Chaque mois, nous allons à la rencontre de l'un des espoirs du Stade Malherbe, qu'il soit déjà un titulaire en puissance de l'équipe première, un néo-professionnel en quête de temps de jeu ou un jeune de la réserve à qui l'on prédit un bel avenir. On parle de foot mais pas que...
Sa jeunesse : les années à Tourlaville
"En U15, il manquait un gardien, je me suis dit : « Je vais dépanner »"
Rien ne prédestinait Sullivan Péan à intégrer le milieu professionnel, et encore moins en tant que portier. Et pour cause, jusqu’en U15, le n°40 des « Rouge et Bleu » évoluait dans le champ ! "J’ai fait tout le tour du terrain, tous les postes : défenseur, milieu, attaquant… Je jouais avec mes potes, je marquais des buts, j’étais content". L’ultime rempart du SMC a donc attendu son passage dans cette catégorie pour s’installer dans les cages. "En 6e, j’étais en section sportive au collège à Cherbourg. Des « spé » gardiens étaient proposés. Ça m’a intéressé", rembobine le principal intéressé. "En U15, il manquait un gardien. Je me suis dit : « Allez, tu as une paire de gants, fonce dans les buts, tu vas les dépanner »". Le coup de foudre fut immédiat. "Plongé dans la boue, j’ai kiffé. Quand j’étais plus jeune, pour moi, je m’imaginais comme la dernière ligne de défense. Même à l’entraînement, j’adorais défier mes potes, arrêter leurs frappes. Je voulais les dégoûter".
De ses nombreuses années à l’AS Tourlaville, son premier club, Sullivan Péan conserve de superbes souvenirs. "L’un de mes plus beaux, c’est quand on remporte le challenge Jean-Michel Chevassut en U11 (le tournoi de l’AST). On avait battu Octeville. Dans le coin, c’était notre principal concurrent. On était comme des dingues d’avoir gagné. C’était pareil pour le tournoi de Bayeux en U13. On avait dominé la MOS en finale aux penalties. J’avais inscrit le mien", se rappelle celui qui a gardé de solides amitiés de cette époque.
Une personne qui compte : son oncle
"Il m’a donné goût au football"
Si, aujourd’hui, Sullivan Péan est en passe de signer son premier contrat professionnel (lire un peu plus loin) au Stade Malherbe, il le doit en grande partie à une personne : son oncle, Samuel. Décédé des suites d’une crise cardiaque en mai 2015, cet éducateur historique de l’AS Tourlaville serait, à n’en pas douter, extrêmement fier de son neveu. Cette tragédie a profondément bouleversé le portier manchois. "On était très proches", confirme-t-il. "Même si j’avais déjà fait des city avec mon père, c’est mon oncle qui a dit mes parents : « Pourquoi je ne l’emmènerais pas avec moi au club ? » J’étais en poussins ou en débutants. Il m’a pris sous son aile. Sur tous les plateaux de jeunes, c’est lui qui me coachait. Il m’a donné goût au football", lui rend hommage le gardien du SMC.
Sullivan Péan doit beaucoup à son oncle, Samuel ; le premier à l'avoir emmené à l'AS Tourlaville. ©Damien Deslandes
Le Stade Malherbe : une acclimatation difficile
"Ma première saison, j’ai été tout le temps blessé"
En rejoignant le Stade Malherbe à 18 ans, Sullivan Péan est passé quasiment d’une séance par semaine à un entraînement quotidien. Autant dire que le changement de rythme fut radical et pas sans conséquences. "Ma première saison à Caen, j’ai été tout le temps blessé". Résultat, l’ex-portier de la « B » du FC Saint-Lô en DHR n’a disputé qu’une seule rencontre sous le maillot « Rouge et Bleu », avec les U19 contre Le Havre, en toute fin de championnat. "J’avais aussi fait une rentrée avec la réserve… sur le champ", se remémore-t-il. "Il y avait beaucoup d’absents, des forfaits, des malades... Je m’étais débrouillé, j’avais chopé deux-trois ballons de la tête", raconte-t-il, avec le sourire, du haut de son 1,93 m.
Si son physique le laisse bien plus tranquille sur l’exercice suivant (2018-2019), son temps de jeu n’augmente guère. "Thomas (Callens) venait de signer pro. C’était devenu le n°3. Quand il n’était pas aligné avec la réserve, c’est Marvin (Golitin) qui jouait et moi, j’étais son remplaçant. On était trois pour une place". Mais sa patience va finir par être récompensée la saison dernière. Marvin Golitin prêté à Granville (N2), Erwin Zelazny mis sur la touche, Sullivan Péan grimpe dans la hiérarchie, partageant les cages de la « B » caennaise avec Thomas Callens. "On alternait. On faisait deux matches chacun".
Un geste : le dégagement
"Une accumulation de petits détails pour péter le ballon plus ou moins loin"
Ça peut paraître anodin au premier regard mais quand le danger se rapproche des 16,50 mètres, autant avoir un jeu au pied fiable pour l’éloigner. "Quand il y a le feu dans la surface, que vous vous retrouvez sous pression, il n’y a pas de risque à prendre", estime Sullivan Péan qui a appris à se faire confiance dans ce domaine. "Je dois encore beaucoup améliorer mon jeu aux pieds mais bon, il n’est pas catastrophique". Et une chose est sûre, il est puissant. "Apparemment, quand je dégage, ça part loin. J’ai une bonne frappe de marmule". Une qualité naturelle qu’il a améliorée à force de travail à l’entraînement. "Il y a la muscu, la vitesse d’exécution du geste, la précision de l’impact… C’est une accumulation de petits détails qui fait que je vais péter le ballon plus ou moins loin".
A l’image de l’utilisation du jeu aux pieds, le portier manchois a été témoin de l’évolution de son poste ces dernières années. "Aujourd’hui, un gardien ne peut pas se contenter de rester sur sa ligne pour faire des arrêts. Il y a aussi les sorties, la lecture du jeu, la nécessité d’accompagner son bloc pour couper les actions adverses".
Ces dernières années, Sullivan Péan a été témoin de l'évolution de son poste. "Aujourd’hui, un gardien ne peut pas se contenter de rester sur sa ligne pour faire des arrêts. Il y a aussi les sorties, la lecture du jeu, la nécessité d’accompagner son bloc pour couper les actions adverses". ©Damien Deslandes
Sa particularité : sa progression dans la hiérarchie
"C’est mieux si je reste en Normandie"
On l’a souvent répété mais il ne faut pas oublier que Sullivan Péan a débuté la préparation, en juin 2020, avec le dossard n°5 dans le dos. Dans les mois qui ont suivi, on a assisté à une valse des gardiens. Erwin Zelazny a résilié, Marvin Golitin a été prêté à Bobigny et Thomas Callens s’est engagé à Lorient. "Quand il y a eu tous ces départs, je me suis dit que j’allais pouvoir jouer avec la réserve, engranger encore plus de temps de jeu que la saison dernière", explique, simplement, le n°40 du Stade Malherbe. Mais le gamin de Tourlaville a dépassé ses espérances. "L’été dernier, jamais je n’aurais cru jouer un match de Ligue 2", confie-t-il. Devenu la doublure de Rémy Riou malgré l’arrivée de Garissone Innocent, il a disputé huit rencontres de championnat, profitant des nombreuses blessures du titulaire du poste. Une progression dans la hiérarchie qui ne l’a pas fait particulièrement bégayer. "Avant Paris (J9. défaite 3-1, le 31 octobre), quand on m’a annoncé : « Sully, c’est toi qui joues », j’ai ressenti un petit coup d’adrénaline mais je ne me suis pas mis une grosse pression. Je me suis dit : « Tu le fais en réserve, pourquoi tu n’y arriverais pas en Ligue 2 ? »"
Maintenant qu’il y a pris goût, Sullivan Péan ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Alors que son contrat amateur expire au 30 juin, le portier manchois aspire à passer professionnel dans son club formateur. "C’est mieux si je reste en Normandie. J’ai mon petit cocon familial". A en croire les propos du directeur sportif Yohan Eudeline*, ça ne devrait pas tarder.
*"On travaille évidemment avec Sullivan et son environnement depuis quelques semaines pour qu’il soit avec nous la saison prochaine. Il n’y a pas de raison que cela ne se fasse pas. C’est un peu plus long que prévu mais on compte énormément sur lui", a déclaré Yohan Eudeline, le directeur sportif du Stade Malherbe, sur les ondes de France Bleu.
Sullivan Péan
> Né le 27 octobre 1999 (21 ans) à Cherbourg (Manche).
> Gardien. Droitier. 1,93 m pour 89 kg.
> Parcours : Tourlaville (équipes de jeunes, jusqu’en 2016), Saint-Lô (DHR, 2016-2017), SM Caen (2017-…).
> Sous contrat (amateur) jusqu’en 2021.