A comme Avranches
Après un premier passage entre août 2019 et mars 2020, Xavier Gravelaine a effectué son retour à l’US Avranches cet été, avec la casquette de directeur sportif (DS). "Je suis content d’être revenu. S’il n’y avait pas eu Guingamp, je ne serais pas parti", rappelle l’intéressé. Une aventure à l’En Avant qui n’avait duré qu’une poignée de mois. A la suite du départ forcé du président Bertrand Desplat, qui l’avait engagé, l’ancien joueur du PSG, Marseille et Monaco avait été poussé vers la sortie. "Avranches, c’est un club comme je les aime avec Gilbert (Guérin), les bénévoles… Il dégage de la sérénité".
Deux ans et demi plus tard, il a retrouvé une structure qui a grandi, avec notamment ce centre d’entraînement à Saint-Martin-des-Champs. "Pas beaucoup de pensionnaires de Ligue 2 disposent d’un tel outil". Le nouveau DS de l’USAMSM l’assure, aujourd’hui, il est parti pour rester. "Je prends plus de plaisir à essayer de prolonger le travail qui a été accompli à l’US Avranches que de bosser dans un club professionnel. Je n’ai pas envie de regarder ailleurs". Et la dernière fois que Gilbert Guérin et Xavier Gravelaine ont été associés, les « Bleus » ne sont pas passés loin de monter à l’étage supérieur. "Aux côtés de Gilbert, on a vraiment été très proche de faire quelque chose de grand avant que le Covid ne nous arrête(1)".
(1)A l’arrêt du championnat de N1 à cause de la pandémie de la Covid-19, l’US Avranches était quatrième ex-aequo à quatre points du podium, avec un match de moins.
D comme Directeur sportif
Quand on a dirigé les recrutements du Stade Malherbe, de Guingamp ou encore de Nantes, exerce-t-on le même métier en gérant le mercato de l’US Avranches, en National 1 ? "Oui et non", répond, en bon Normand (d’adoption), Xavier Gravelaine. "Comme les approches au niveau amateur (toutes les équipes en N1 ne sont pas professionnelles) ne sont pas identiques, je m’adapte. Bien qu’avec le temps, on a affaire aux mêmes hommes. On fait fonctionner nos réseaux". D’ailleurs, lors de sa précédente expérience à l’USAMSM, le mercato avait été plutôt couronné de succès. "En recrutant les Parisiens (Samuel Essende, Lorenzo Callegari, Alec Georgen), Victor Lobry (désormais à Saint-Etienne), on ne s’était pas trop trompés avec Gilbert".
Alors qu’elle a souvent construit son effectif en se faisant prêter des jeunes éléments sous contrat avec des écuries de Ligue 1 et de Ligue 2 ; principalement pour des raisons économiques, l’US Avranches, sous l’impulsion de Xavier Gravelaine, aspire à changer de braquet même si ce filon n'a pas été complètement abandonné à l'image de l'arrivée de l'Auxerrois Nicolas Mercier. "On veut aussi des joueurs qui nous appartiennent, créer un actif joueur. Certains y parviennent (Concarneau a vendu Donatien Gomis à Guingamp). Pérenniser le club à ce niveau passe par là". D’où la signature de Victor Daguin, l’ex-capitaine de la réserve du FC Nantes (N2) pour trois ans, et la prolongation, pour une durée similaire, du prometteur défenseur central Mathis Lemeray.
Avec l'US Avranches, Xavier Gravelaine veut "créer un actif joueurs" pour "pérenniser le club à ce niveau".
F comme la famille Fortin
C’est un secret de polichinelle, les liens qui unissent Xavier Gravelaine et Jean-François Fortin dépassent le cadre du football. "On se voit toutes les semaines, on mange notre steak frites ensemble. Je me considère de la famille. On partage des valeurs en commun comme la fidélité". Preuve en est, s’il avait accepté de « couper la tête » de son directeur général de l’époque sous la pression de ses collègues actionnaires, peut-être que JFF serait toujours président du Stade Malherbe aujourd’hui. "Je suis triste de ce qu’ils lui ont fait(2). Ceux qui ont coulé le club n’ont pas assez payé l’addition. On l’oublie trop facilement", regrette encore Xavier Gravelaine de retour dans le monde du ballon rond grâce à la famille Fortin. "Que ce soit Jean-François et Guillaume (son fils), ce sont eux qui m’ont sorti du canapé. Sans eux, je ne pense pas que je serais revenu dans le foot. Après Guingamp, je n’avais plus envie".
Oeuvrant de nouveau dans ce milieu, le DS de l’US Avranches est convaincu que la famille Fortin, elle aussi, est loin d’en avoir fini avec le football(3). "Si jamais un jour il a les clés d’une boutique, Guillaume sera un grand président de club. C’est un passionné. Ça ne trompe pas, c’est une intuition".
(2)En avril 2018, Pierre-Antoine Capton avait présenté, avec le soutien de Jean-François Fortin, une offre de reprise de 67% des parts de la holding SMC 10, détenant, à l’époque, 80% du Stade Malherbe et dont il était l'un des 13 actionnaires. Cette proposition avait marqué le début d’une crise de gouvernance, débouchant sur l'éviction de Jean-François Fortin de la présidence puis celle de Xavier Gravelaine.
(3)Marque de la coopérative laitière Les Maîtres Laitiers du Cotentin, dirigée par Jean-François et Guillaume Fortin, Campagne de France est l’un des principaux partenaires de l’US Avranches.
Xavier Gravelaine le reconnaît, sans Jean-François Fortin et son fils, Guillaume, jamais il ne serait revenu dans le milieu du foot.
G comme Gilbert Guérin
A Avranches, Xavier Gravelaine est associé au président Gilbert Guérin, deux forts caractères qui vont de nouveau cohabiter. Une perspective qui n’effraie nullement le directeur sportif. "Que ce soit Gilbert ou moi, je nous trouve plus apaisés que durant notre première collaboration". Forcément, ce binôme requiert quelques ajustements. "Gilbert a été habitué à tout faire tout seul, il bataille sur tous les fronts, notamment sur le plan financier, pour dénicher des partenaires. Mon rôle, c’est d’essayer de l’aider sur le plan sportif. Je suis là pour le soulager. Il sait qu’il peut se reposer sur moi, avoir toute confiance".
A ce duo s’ajoute un troisième homme : le coach Damien Ott. "Avec Damien, on a fait le bon choix. On forme un trio assez homogène. Ça me rappelle des choses intéressantes". Xavier Gravelaine en est persuadé, il croit en la force du collectif. "J’ai toujours fonctionné ainsi. L’association de trois personnes est plus avantageuse que quand on est seul. C’est mieux de partager. Après, bien sûr qu’à certains moments, il faudra trancher". Reste à savoir qui du DS ou du président aura le dernier mot.
Xavier Gravelaine aux côtés du président Gilbert Guérin et du coach Damien Ott, voici le nouveau visage de l'US Avranches.
M comme Malherbe
Deux passages sur le terrain (1991-1993 puis 2001-2002), qui lui ont valu d’ailleurs d’être élu joueur du siècle par les supporters « Rouge et Bleu », élément majeur lors de l’unique participation du club à une Coupe d’Europe (contre les Espagnols de Saragosse, en septembre-octobre 1992), un retour comme directeur général pendant quatre ans (2014-2018)… Pour toujours, l’histoire de Xavier Gravelaine sera liée au Stade Malherbe. Mais le directeur sportif de l’US Avranches le garantit : "Je ne reviendrais plus". Les circonstances de son départ en 2018 ont engendré une cicatrice qui ne se refermera peut-être jamais totalement.
"Je vais certainement paraître prétentieux mais j’estime que le club me doit plus que ce que je n’ai reçu. Et je ne parle pas de pécunier mais de respect. Le temps fait qu’on oublie. Et certains font tout pour ça", déplore le principal intéressé, rappelant quelques-unes de « ses » vérités. "A une époque, les deux transferts qui ont sauvé le Stade Malherbe du dépôt de bilan, c’est celui de Franck Dumas (à Monaco en 1992) et le mien (au PSG, un an plus tard)". Xavier Gravelaine en profite aussi pour défendre son bilan en tant que directeur général. "L’équipe s’est maintenue en Ligue 1, un camp d’entraînement a été réalisé, le stade rénové, les caisses ont été remplies, il n’y avait pas de dettes… Qu’est-ce qu’il fallait faire de plus ?", s’interroge-t-il. "On a fait grandir le club. Entre 2014 et 2018, le Stade Malherbe a connu de belles heures. Je lui souhaite d’en connaître d’autres, notamment pour Pierre-Antoine Capton (l’actuel copropriétaire du SMC)".
Xavier Gravelaine à l'époque de son premier passage comme joueur au Stade Malherbe, au début des années 1990.
N comme National
On l’a déjà souligné sur notre site, compte tenu du passage de la Ligue 1 et de la Ligue 2 à 18 clubs, respectivement en 2023 et 2024, il y aura six descentes (contre quatre habituellement), sur un championnat comprenant 18 équipes, lors des deux prochains exercices de National. "C’est un sacré challenge qui se présente devant nous. La saison la plus dure, c’est celle qui vient. C’est celle de tous les dangers, pas seulement pour Avranches mais pour tous les « petits » clubs", se montre parfaitement conscient Xavier Gravelaine pour qui le visage du N1 va être profondément bouleversé. "Ça ne va plus du tout ressembler à ce qu’on a connu. D’ici quelques années, il ne risque plus d’y avoir que des grandes villes à ce niveau".
Surtout que ces six relégations, deux saisons de suite, ont provoqué une course à l’armement chez certains pensionnaires de cette troisième division. "Pour rester en National, je vois des clubs proposer des salaires comme j’ai rarement vu à ce niveau. Il va y avoir beaucoup de pression dans ce championnat où tout le monde peut battre tout le monde". Dans ce contexte, et avec ses moyens (avec un budget n’excédant pas 2,5 M€ quand le promu Versailles dépasse les 6 M€ à titre de comparaison), l’US Avranches, présent à cet échelon depuis 2014, va tenter de conserver son statut de plus ancien pensionnaire de N1.
Avec six descentes sur un championnat comprenant 18 équipes, deux saisons de suite, c'est un véritable défi qui attend l'US Avranches du capitaine Charles Boateng.