Un pur produit de la Bretagne
S'il y a quelque chose de commode à porter les couleurs de l'US Avranches depuis maintenant plus d'un an pour Alan Kérouédan, c'est qu'il se retrouve à deux pas de sa Bretagne natale. Trahi d'emblée par un nom de famille qui ne laisse pas de place au doute, l'attaquant a vu le jour dans le Finistère en 2000, et le ballon rond a depuis toujours eu une place centrale dans la vie du jeune homme. Le football d'ailleurs, c'est une histoire de famille chez les Kérouédan. "Mon père jouait dans le club de Plozévet et le week-end, j'allais le voir avec mon grand-père", évoque l'Avranchinais en convoquant les souvenirs de son enfance. "C'est comme ça que j'y ai pris goût. Aujourd'hui, le petit frère a d'ailleurs aussi pris le relais". Joueur de l'Entente Sportive Mahalont-Confort à ses débuts, le jeune Alan a rapidement pris goût pour la discipline et eu envie de se donner les meilleures chances de progresser.
S'il rejoint en 2011 la Stella Maris de Douarnenez, c'est bien en 2013, l'année de ses 13 ans, que la vie de footballeur du jeune adolescent prend un vrai tournant. "Je me suis inscrit pour le pour le Pôle Espoir, j'ai fait les tests et j'ai été pris", raconte-t-il. "La première année, j'étais la semaine à Ploufragan et le week-end, je jouais à Douarnenez. L'année d'après, j'ai rejoint Concarneau tout en restant au Pôle Espoir". Si pendant de longs mois, Alan Kérouédan doit régulièrement traverser la Bretagne, son port d'attache se nomme rapidement le Stade Rennais dont il rejoint le centre de formation dès 2015. "À Concarneau, j'ai mis 40 buts en championnat et Rennes est arrivé. Je ne me suis alors pas posé de question et j'ai directement signé là-bas". Dans la capitale bretonne, le natif de Quimper appartient à une génération dorée aux côtés notamment de Warmed Omari, Lorenz Assignon, Wilson Isidor ou encore Sofiane Diop et commence à rêver plus que jamais de professionnalisme, d'autant qu'il est régulièrement appelé en équipe de France jeunes et dispute même le Mondial U-17 en 2017.
Le RAF pour se roder au monde « pro »
Est-ce parce que la concurrence se veut féroce autour de lui ou est-ce simplement parce qu'il ne coche alors pas toutes les cases ? Toujours est-il qu'au sortir de sa cinquième saison au Stade Rennais, Alan Kérouédan n'est pas conservé. La déception ne s'étire toutefois guère longtemps et le contrat professionnel dont il rêvait tant, il le signe à 800 kilomètres de là, en l'occurrence au Rodez AF qui ambitionne de l'intégrer à son projet de structuration en Ligue 2. "J'avais besoin d'un projet où je sentais que le club me faisait confiance", rembobine le principal intéressé. "Il fallait que j'apprenne aussi ce que c'était le haut niveau, que ce soit dans l'exigence, l'entraînement en dehors du terrain, tout ce qui me manquait, je pense, pour signer pro à Rennes". Rodez ayant été le plus insistant et le plus convaincant, c'est le club de l'Aveyron qui s'attire donc les faveurs du désormais ex-Rennais.
Au RAF, Alan Kérouédan va disputer 31 rencontres toutes compétitions confondues en l'espace de deux saisons. Pour un joueur aux prémices de sa vingtaine qui découvre le monde professionnel, la statistique pourrait sembler correcte, sauf qu'au fil des mois, le Breton sent que la dynamique ne va pas dans le bon sens et qu'il est de moins en moins en phase avec ses objectifs. Payant sans doute au passage un premier match raté à Caen (J1. 4-0, le 24 juillet 2021), il glisse dans la hiérarchie d'entrée de saison en 2021-2022. "C'était la première fois que je ne jouais quasiment pas et du coup, au bout d'un moment, j'ai cogité". Après un beau rebond en fin de saison qui aura permis à Rodez de valider son maintien sur le fil, Alan Kérouédan prend alors la décision de changer d'air. "Mon aventure a été un peu mitigée, mais sur le plan mental, j'ai vraiment appris quelque chose, d'autant que c'était aussi la première fois que j'étais aussi loin de ma famille".
Avec sept buts et trois « assists », Alan Kérouédan est le joueur les plus décisif du championnat de National. ©Damien Deslandes
Quitter le National pour la Ligue 2 ? Même pas peur !
A l'été 2022, Alan Kérouédan décide de reculer pour se donner les meilleures chances d'avancer. En rejoignant l'US Avranches, club doyen du National et grand spécialiste de la troisième division, le gamin de Mahalont troque ses rêves d'enfant contre un choix sportif plein de maturité. En Normandie, le désormais ex-Ruthénois espère obtenir davantage de temps de jeu pour briller aux yeux des observateurs tout en progressant dans un club tremplin sous les ordres d'un entraîneur réputé, Damien Ott. "Au départ, sincèrement, je cherchais un autre club de Ligue 2, je voulais rester dans le monde professionnel. On a cherché avec mon agent, mais rien ne marchait et Avranches était là depuis un moment. Alors, j'ai fini par me dire : « Fonce, Alan ! Ces gens te veulent vraiment ». Dès les premiers coups de fils, dès que j'ai parlé avec le coach, j'ai ressenti un très bon feeling".
Dans la quiétude du Sud-Manche, en plus de se rapprocher significativement de Rennes où vivent encore nombre de ses amis, Alan Kérouédan dispute, durant l'exercice 2022-2023, 32 des 34 journées de championnat. Son apport sur le collectif se veut immédiat et, comme un symbole, c'est même lui qui ouvre le bal en marquant lors de sa première à Cholet (victoire 3-1 transformée en revers 3-0 sur tapis vert). "Je pense que j'ai su montrer au coach dès début de la saison que j'étais impliqué dans le projet et que j'étais là pour l'équipe", estime le joueur de 23 ans. "J'ai kiffé parce que j'ai pu enchaîner les matches. J'ai été performant tout au long de la saison et j'ai pu avoir quelques bonnes statistiques aussi (cinq buts et sept passes décisives)". Et cerise sur le gâteau, si la saison n'aura pas été qu'un long fleuve tranquille, le Breton a le bonheur de célébrer un nouveau maintien d'Avranches en National au soir de la 34e et dernière journée.
Un joueur performant et discret
Pour sûr, Damien Ott ne croyait certainement pas qu'Alan Kérouédan ferait toujours partie de son effectif en cet automne 2023. Pour l'ancien entraîneur de Colmar, il ne faisait aucun doute qu'un club professionnel allait se manifester. "Il n'y a pas eu d'offre concrète, il n'y a rien eu et moi, je n'ai pas forcé", reconnaît Le Breton qui, malgré une ambition de redevenir « pro » toujours présente, a rempilé "avec plaisir" à Avranches. Tant mieux pour le club manchois, tant pis pour les autres, serait-on tenté d'écrire, car le début de saison du natif de Quimper est tout simplement remarquable. En neuf matches de championnat disputés, l'attaquant polyvalent, capable d'évoluer à de nombreux postes sans pour autant perdre de son influence, a déjà fait trembler les filets à sept reprises et distribué trois passes décisives. Parmi les trois premières divisions françaises, il n'y a guère que l'Auxerrois Gauthier Hein, en Ligue 2, qui puisse se targuer d'avoir réalisé un meilleur départ sur le plan statistique.
Actuel meilleur buteur du National, Alan Kérouédan ne s'enflamme pas pour autant et, de manière assez surprenante d'ailleurs, l'engouement médiatique reste relativement calme autour de son entame de saison admirable. "Je suis quelqu'un de discret, voilà", assume l'Avranchinais. "J'ai été éduqué comme ça. Je suis quelqu'un qui reste avec ses proches, je ne parle pas beaucoup quand je suis hors de mon cadre. Dans le vestiaire, je parle avec tout le monde, mais je ne prends pas la parole devant tout le monde, ce n'est pas mon caractère". Fidèle à lui-même et à ses principes, ce fan de Cristiano Ronaldo est, en tout cas, parti fort et il n'entend pas s'arrêter en si bon chemin. Et alors que les supporters d'Avranches s'inquiétaient de ne pas voir l'épatant Goduine Koyalipou être remplacé, son successeur, tapi dans l'ombre, était en réalité déjà au club. La lanterne rouge Epinal, futur adversaire d'Avranches, ce vendredi, et son co-meilleur buteur du championnat Esteban Lepaul savent déjà de qui il faudra se méfier côté manchois.
> N1. J13 - Epinal (18e - 7 points) / US Avranches (10e - 16 points), vendredi 10 novembre à 19 H 30 au Stade de la Colombière.