Sa relation avec Luka Elsner
"Un garçon intelligent, curieux de beaucoup de choses, toujours dans la recherche"
"C’est également pour moi l’occasion de remercier le staff et notamment Serge (Costa) qui a repris les coups de pieds arrêtés offensifs ; un secteur où on n’était pas très performant*. Probablement, un peu à cause de moi. Franchement, le boulot accompli est génial et ça se concrétise par l’ouverture du score de Gautier (Lloris). J’ai vraiment un staff de très grande qualité". Après la probante victoire du HAC aux dépens de Lyon il y a deux semaines (J18. 3-1, le 14 janvier), Luka Elsner n’a pas manqué de souligner l’importance du travail abattu par son adjoint. Un bras-droit qui l’accompagne maintenant depuis quatre ans et leur passage commun à Amiens. "C’est John Williams, le directeur sportif, qui nous a présentés. En une demi-heure, on avait matché. Dans ma vie, j’ai rarement vu quelqu’un bosser autant que Luka. Malheureusement, à cette époque, on n’a collaboré que trois mois ensemble à cause du Covid", rembobine le technicien franco-portugais, référence à la crise sanitaire qui a mis fin prématurément aux championnats en France en mars 2020.
Toutefois, cette parenthèse picarde ne restera pas sans lendemain. Alors que le coach d’origines slovènes est nommé à la tête de Courtrai en janvier 2021, Serge Costa (36 ans) le suit dans cette aventure en D1 belge. Derrière, le duo poursuit sa route au Standard de Liège. Deux expériences en Jupiler League pour autant de bilans totalement opposés. "A Courtrai, on a appliqué nos méthodes comme on le souhaitait, en lien avec le staff déjà en place, dans un club ultra familial. Au Standard, ce fut bien plus compliqué car on n’a pas pu s’exprimer comme on pense qu’il faut le faire pour remporter des matches", expose le natif de Sarrebourg. Avec Luka Elsner, Serge Costa a rencontré "un garçon intelligent, curieux de beaucoup de choses, constamment dans la recherche". "Avec Luka, les semaines ne se ressemblent jamais car il est très ouvert à l’innovation", ajoute-t-il. "On est dans un échange méthodologique. On se demande toujours comment on peut améliorer tel exercice, comment on peut résoudre telle problématique sur une phase de jeu".
*Avant le but de la tête de Gautier Lloris contre Lyon, à la suite d’un corner botté par Christophe Opéri, Le HAC n’avait inscrit depuis le coup d’envoi de cet exercice qu’un seul but sur coups de pied arrêtés avec… le penalty de Mohamed Bayo contre Nice (J16. victoire 3-1, le 16 décembre).
Le développement individuel des joueurs
"Mettre des stratégies en place pour que le joueur soit plus rentable à son équipe"
Parmi les nombreuses missions dont il a la responsabilité au Havre, Serge Costa s’occupe de développement individuel. Il faut dire que c’est l’une de ses spécialités. "Pendant mon passage au centre de formation de Strasbourg, Fitzgerald Thomas, l’agent d’André Ayew, m’a contacté. Avec Bouna Ndiaye, qui lui est l’agent de Rudy Gobert (international français de basket qui évolue en NBA), ils voulaient instaurer un suivi sur des joueurs à ce niveau-là". C’est ainsi que n°2 du HAC est amené à collaborer avec de futurs internationaux tricolores parmi lesquels Mattéo Guendouzi, Benjamin Pavard, Aurélien Tchouaméni… "On utilise de la data, des images de matches, des exercices à réaliser à domicile afin de mettre en place des stratégies de jeu pour que le joueur devienne plus rentable (dans le sens utile) à son équipe", détaille le technicien. "A Strasbourg, quand j’étais avec la réserve, on a beaucoup bossé avec Youssouf Fofana (actuellement à Monaco, 15 sélections avec les Bleus). Je lui répétais toujours : « Projette-toi. A quoi tu vas servir chez les pros ? Comment tu vas intégrer ce collectif ? » On ciblait un partenaire-concurrent (un joueur évoluant au même poste) pour voir ce qu’il faisait sur le terrain et comment il pouvait essayer de faire mieux".
Chez le club doyen, le développement individuel est l’apanage de l’ensemble du staff : Thomas Erhard (adjoint), Jean-Michel Lesage (entraîneur des attaquants), Julien Momont, Clément Gonin (analyse de jeu), les préparateurs physiques Thomas Joubert, Florian Thélamon et même Luka Elsner ! "J’ai rarement vu un n°1 prendre autant de temps pour travailler avec un joueur en particulier", n’en revient presque pas Serge Costa. A l’exception du « patron », les membres du staff procèdent souvent par équipe de deux. "Mais on change tout le temps les binômes. On tient même un tableau pour savoir quel joueur a bossé sur quel aspect et avec qui". Chacun apporte sa compétence dans un domaine spécifique. C’est le cas de Nicolas Douchez, le responsable des gardiens. "La saison dernière, on a insisté avec Amir (Richardson, aujourd’hui à Reims) sur la manière de casser une ligne. On lui a montré des images de Blaise Matuidi, on a lui a fourni de la data. Comme Nico a été son partenaire (au PSG), il lui a expliqué comment il se déplaçait sur un terrain, comment il s’entraînait… Bien sûr, l’exemple de Blaise Matuidi n’était pas anodin. On savait que Nico pourrait partager son vécu".
Son parcours
"Ça allait plus vite dans ma tête que dans mes pieds"
Avant de poser ses valises au Stade Océane (au sens propre comme au figuré, lire ci-dessous), on a presque envie d’écrire que Serge Costa a connu 1 001 vies ! La première, en tant que joueur de niveau régional, au FC Sarrebourg, le club de sa ville natale. "J’ai joué jusqu’en DH (l’actuel R1) mais j’ai très bien vu que je ne pourrais pas aller plus haut. J’étais ultra-compétiteur mais j’ai été très vite limité par mon corps, par ma technique. Ça allait plus vite dans ma tête que dans mes pieds", lance, avec le sourire, celui qui a démarré attaquant. "Comme je n’étais pas grand, j’ai reculé, j’ai touché à tous les postes". Souhaitant à tout prix resté dans le milieu du ballon rond, le Mosellan se reconverti dès sa majorité en tant qu’éducateur, abandonnant trois ans plus tard sa carrière de joueur. Des premiers pas à l’AS Nancy Lorraine avec les débutants puis un retour à Sarrebourg à la tête des U19, des U17 avec comme point d’orgue une montée en honneur. Au milieu des années 2010, le n°2 de Luka Elsner rejoint, à l’initiative de Jean-Marc Kuentz, l’un des adjoints aujourd'hui de Patrick Vieira, le centre de formation du RC Strasbourg. Un club alsacien où il fait la connaissance d’un jeune pensionnaire du centre : un certain Yoann Salmier qu’il a retrouvé cet été au HAC.
Entre les deux, Serge Costa marquera une pause pendant trois ans ; période durant laquelle il devient pour Puma responsable sponsoring. "On devait faire signer des joueurs avec la marque dans l’optique de l’Euro 2016. On a fait Antoine Griezmann, Thomas Lemar, Kalidou Coulibaly… On a prolongé Olivier Giroud". En parallèle, le technicien s’est construit un bagage universitaire avec un master STAPS marketing-gestion ainsi que deux DU de préparateur mental et physique. Titulaire du DES ; diplôme fédéral permettant d’entraîner jusqu’en N2 en France, le Franco-portugais décroche également le « High performance football coaching » à l’université de Lisbonne. "Pour les coaches étrangers, c’est un condensé en un an de la licence qu’ont obtenu des coaches comme (Leonardo) Jardim et (José) Mourinho. Il y a des cours sur les rapports avec ton président, du media-training, sur la gestion des joueurs qui n’ont pas de temps de jeu… Tu ne retrouves pas ça en France". Depuis 18 mois, il y a désormais ces compétences chez les « Ciel et Marine ».
> L1. J19 - Lorient (18e - 12 points) / Le Havre AC (11e - 22 points), dimanche 28 janvier à 15 heures au Stade du Moustoir.
Quand Mathieu Bodmer joueur influençait Serge Costa le technicien
Serge Costa a rencontré Mathieu Bodmer à Amiens, quand le directeur sportif du HAC achevait sa carrière de joueur. ©Emmanuel Lelaidier
Au HAC, Serge Costa a, bien entendu, retrouvé Mathieu Bodmer qu’il avait côtoyé à la fin de sa carrière à Amiens. "Le Mathieu Bodmer joueur m’a expliqué des choses sur le jeu, notamment que dans des zones, il ne regardait pas, il comptait le nombre de joueurs adverses. Et s’ils étaient plusieurs dans une zone, ça signifiait qu’ils n’étaient pas ailleurs et donc que des espaces se libéraient. C’est un concept qu’on a appelé : « Jouer ce que je ne vois pas »", décrypte le technicien franco-portugais qui ne manque pas de souligner le poids du directeur sportif dans les résultats des « Ciel et Marine » depuis la saison dernière, tout comme celui de l’intégralité de l’Etat-major.
"Au Havre, on a une direction compétente. C’est le socle du club. Elle nous apporte de la confiance, des connaissances, du soutien… Elle connaît le football, les hommes, les problématiques de groupe... Limite, Mathieu Bodmer, il sait ce qu’un joueur ressent avant même que l’intéressé en ait conscience". Pour le Mosellan de naissance, si le HAC performe, c’est parce que "tout le monde tire dans le même sens : le sportif, le médical, le team manager… Il y a une soif d’avancer, de gagner. Il ne faut pas oublier que ça faisait 14 ans que le club était en Ligue 2 !"
"Limite, Mathieu Bodmer, il sait ce qu'un joueur ressent avant lui"
Serge Costa
Dans la cité Océane, Serge Costa a aussi fait des rencontres qui le marqueront à vie à l’image de Nicolas Douchez, l’entraîneur des gardiens. "Aujourd’hui, avec Nico, on a une relation très forte alors qu’on ne se connaissait même pas il y a un an et demi". Il faut dire que les deux hommes, aux prémices de leur aventure commune au sein du staff de Luka Elsner, ont quasiment vécu jour et nuit ensemble, pendant deux mois ! "On dormait tous au stade (au sein de l’hôtel qui y est intégré). On faisait des journées de 8 heures à 1 heure du mat’. Il y avait toujours des choses sur lesquelles réfléchir. J’ai l’impression d’avoir connu trois années en une seule".