On savait avant même la parution du calendrier du championnat de National que le premier duel de la saison entre le FCR et QRM cristalliserait toutes les attentions. Ce qu'on n'avait toutefois pas anticipé, c'est que l'acteur central de ce choc de la 14e journée de troisième division ne serait autre que Régis Brouard. Pour rappel, celui qui a repris les rênes des « Diables Rouges » début novembre est une des légendes du voisin, du temps où il s'appelait encore USQ. Ses exploits de l'époque ont d'ailleurs profondément marqué ceux qui les ont vécus à ses côtés. "Je me suis totalement retrouvé dans ce qu'il mettait en place, à savoir faire exister le joueur par le jeu", expose Matthias Jouan, aujourd'hui entraîneur de l'US Granville (National 2) et qui a eu Régis Brouard comme coach lors de ses années quevillaises. "Par sa connaissance du joueur, parce qu'il a un vécu de joueur, sa connaissance de plein de choses, il sait quand vous allez mal, quand vous allez bien, il sait trouver les bons mots pour vous rendre meilleur. Quand ça ne va pas, il sait trouver les bons mots aussi pour que ça aille mieux".
Deux épopées en Coupe de France dont une finale au Stade de France contre Lyon (défaite 1-0, le 28 avril 2012) ainsi qu'une montée en National à l'issue de la saison 2010-2011 ont marqué le passage mémorable de Régis Brouard sur le banc des « Jaune et Noir ». A cette époque, il le partageait avec David Fouquet, son adjoint, d'abord arrivé en qualité de préparateur physique. "Je l'ai accompagné du premier jusqu'au dernier jour", se souvient celui qui officie désormais aux commentaires des rencontres du FCR et de QRM sur FFF TV. "Avant toute chose, c'est un passionné. Qui dit passion, dit aussi parfois dans l'excès, que ce soit dans le bon ou dans le mauvais. C'est quelqu'un qui est méticuleux, qui est hyper précis, qui est hyper pointu sur l'approche tactique. Parce que moi, très souvent, j'observais les adversaires. Donc, il fallait être performant à ce niveau-là".
"Il m'a fait confiance. je ne suis pas sûr que tout le monde l'aurait fait. J'ai eu un peu ce privilège"
Valentin Sanson
Evoluer aux côtés de Régis Brouard, c'est s'embarquer inévitablement dans une aventure humaine, le technicien mettant un point d'honneur à développer de vrais liens avec ses joueurs et ses collègues, peu importe leur origine ou leur vécu. "C'est lui qui m'a tout simplement lancé", raconte Valentin Sanson, le défenseur des « Diables Rouges », qui a retrouvé son mentor après 12 ans de séparation. "Je venais de Pavilly et je jouais en senior, mais c'était en DHR (R3). J'avais 17 ans et c'est lui qui m'a contacté. Je ne vais pas mentir, je suis arrivé sur la pointe des pieds, mais il m'a vraiment mis à l'aise, il m'a fait confiance, parce que je ne suis pas sûr que tout le monde l'aurait fait. J'ai eu un peu ce privilège, ça ne m'a pas couvert, mais il m'a laissé progresser au fur et à mesure en me faisant confiance". "Il donne énormément de confiance aux joueurs", ajoute Matthias Jouan. "C'est surtout là qu'il est bon aussi. Humainement, il y a des choses qui se passent. Dans la relation joueur-entraîneur, c'est un tout et ça reste positif".
Le roi des causeries qui fait des émules
S'il est un entraîneur aujourd'hui très complet, qui a su s'abreuver d'expériences dans le monde amateur et plus récemment dans le monde professionnel, que ce soit à Clermont, à Niort ou à Bastia, Régis Brouard excelle dans un domaine en particulier, c'est dans l'art du discours. "J'ai toujours été bluffé par sa capacité à se renouveler à chaque causerie parce qu'il avait toujours un levier à actionner", expose David Fouquet, admiratif. "Il faisait se lever les foules, en fait. Il embarquait tout le monde avec lui, il faisait en sorte que tu aies les poils qui se hérissent. Et moi, à chaque fois, je me disais : "Mais où il va puiser ça ?" À chaque fois, il trouvait le levier. C'était incroyable". Si l'on en croit Valentin Sanson, le technicien, du haut de ses 57 ans, n'a rien perdu de sa verve. "Oui, il arrive toujours à te captiver sur ses causeries", confirme l'ancien arrière d'Evreux. "Là, il a fait trois matches et sur les trois causeries, il a réussi à nous motiver, à vraiment être sur l'aspect mental et émotionnel. En fait, c'est toujours la même personne avec un peu plus d'expérience et de vécu. Il n'a pas changé et il est toujours aussi performant là-dessus".
"C'est lui qui m'a mis le pied à l'étrier, qui m'a appris ce métier. Quand tu es son adjoint, c 'est un apprentissage à vitesse grand V"
David Fouquet
A travers sa faculté à fédérer, Régis Brouard a également trouvé la capacité de faire s'élever ses collaborateurs ou tout simplement ses joueurs. Aujourd'hui entraîneur en N2, Matthias Jouan ne cache pas que son ancien coach a influé le technicien qu'il est devenu. "Je suis un peu dans la même philosophie de jeu que lui", exprime le coach granvillais. "Les séances avec beaucoup de ballon, la recherche de l'appui remise, moi, je suis resté dans cette voie et c'est vrai que je me suis appuyé dessus". David Fouquet, lui, s'est enrichi personnellement après quatre années passées aux côtés de l'ex-milieu du SM Caen. "C'est lui qui m'a mis le pied à l'étrier", reconnaît celui qui a dirigé notamment le Grand-Quevilly FC. "C'est lui qui m'a appris le métier d'entraîneur. C'est lui qui m'a fait aimer ce métier-là. Quand tu es son adjoint, que tu profites de sa confiance et qu'il te laisse carte blanche, c'est un apprentissage à vitesse grand V. Vraiment, c'est top".
Et à ceux qui auraient pu penser que la magie qu'est capable de générer Régis Brouard aurait pu s'estomper en plus de dix ans passés loin de la Normandie, ses premiers résultats avec le FCR parlent pour lui : trois matches, trois victoires dont une qualification pour les 1/32es de finale de la Coupe de France (avec une affiche de prestige contre le LOSC, 4e de L1, le 20 décembre). "Il n'a pas révolutionné l'aspect tactique, technique, toutes ces choses-là, même s'il a posé sa patte et son projet de jeu", assure Valentin Sanson. "Mais il a beaucoup axé sur le fait d'en faire davantage, le don de soi, l'aspect mental. Justement, derrière, on retrouve les vertus qui étaient les nôtres sur la saison dernière". "Quand il a pris ses fonctions à Rouen, j'ai vu sa causerie, et il a dit aux joueurs : « Vous êtes bons, vous êtes capables de faire de grandes choses »", rapporte Matthias Jouan. "Ce n'est pas spécialement pour vous faire monter ou pour vous transcender, par contre, il a les mots justes". "Pour lui, le foot, on a la chance de le vivre", glisse David Fouquet en conclusion. "Ce n'est que du plaisir, ce n'est qu'une passion, c'est un jeu. Et il faut toujours dédramatiser et justement, il a toujours désacralisé les moments importants". Le derby de vendredi contre QRM en sera assurément un. Nul doute alors que la causerie d'avant-match sera à la hauteur de l'événement.
> National 1. J14 - FC Rouen (11e - 15 points) / Quevilly-Rouen Métropole (12e - 15 points), vendredi 6 décembre à 19 H 30 au Stade Robert-Diochon.