Alors qu'il a beaucoup été question des enjeux financiers autour de la Ligue 1 et la Ligue 2, cette crise sanitaire impacte tous les échelons du football français, jusqu'à la dernière division de District, à tous les niveaux : social, sportif et économique. Avant que la FFF ne scelle définitivement l'avenir des championnats régionaux et départementaux (on ne voit pas comment il pourrait en être autrement) lors de son prochain Comité exécutif, jeudi (16 avril), nous donnons la parole à des dirigeants. C'est au tour de Victor Granturco, secrétaire général et responsable financier de l'AS Villers-Houlgate (R2), de se confier.
Des clubs de foot à l'arrêt
"Le lendemain, à notre réveil, ce fut la douche froide"
"M. Le Graët (le président de la Fédération française) s'est exprimé très tard dans la soirée du jeudi (12 mars). Le lendemain, à notre réveil, ce fut la douche froide. On compte tout de même 420 licenciés sans compter nos nombreux éducateurs et bénévoles. L'arrêt fut brutal. On a aussi trois salariés (+ un service civique), trois CDI qui sont rémunérés entièrement par le club. Dès le lundi suivant (le 16), ils ont été placés en chômage partiel. On s'est, toutefois, assurés qu'ils perçoivent 100% de leur salaire pour le mois de mars. Ils ont tous des familles, des charges auxquelles ils doivent faire face.
Pendant cette période, on essaye de rester en contact avec les différentes composantes du club, de garder un lien même si c'est très difficile. On a des groupes de discussions. Pour les plus jeunes, nos éducateurs passent par les parents. Au début du confinement, beaucoup de nos licenciés ont participé au PQ Challenge (défi consistant à jongler avec du papier toilette)".
L'avenir des championnats
"Que les décisions de la FFF collent le plus possible à la réalité du terrain"
"Je ne doute pas que les championnats soient arrêtés. Et même si on est parfaitement conscients que ce n'est pas la priorité aujourd'hui, on ne peut pas éluder la question sportive. Quelle que soit l'issue pour les montées et les descentes, on veut savoir. C'est important que la décision tombe. La Fédération l'a repoussée. Les clubs sont dans l'incertitude. Je regrette ce manque de clarté. A Villers-Houlgate, peut-être qu'on constitue un cas unique puisque trois de nos équipes seniors sont concernées par la montée. Pour notre B et notre C, on a beau prendre les classements dans tous les sens, on ne voit pas comment elle pourrait nous échapper, à moins d'un rétropédalage de la Fédération sur la question d'une saison blanche.
Pour notre équipe première (R2), on se trouve à égalité de points avec la réserve d'Alençon mais avec un match en plus. Sur un week-end d'intempérie, on a pu jouer sur notre terrain de rempli, un synthétique. Avant l'arrêt des compétitions, on était en tête à la faveur du goal-average particulier car on s'est largement imposés à l'aller (victoire 11-0 mais défaite 2-1 au retour). Pour les montées et les descentes, je ne pense pas qu'un seul critère sera retenu mais plutôt une combinaison de plusieurs. Si on prend seulement en compte le ratio du nombre de points sur le nombre de matches joués, on pourrait très bien imaginer un cinquième avec trois matches de retard décrocher la montée. Pour moi, ça serait une insulte au football. J'espère que les décisions prises colleront le plus possible à la réalité du terrain.
Je rappelle qu'on est partis des profondeurs du District et aujourd'hui, on touche du bout des doigts l'accession en R1. Symboliquement, pour nous, ça représente beaucoup. Maintenant, si les décisions de la Fédération ne nous sont pas favorables, ne comptez pas sur nous pour faire appel. De toute façon, comme tout se décidera à Paris, je souhaite bien de la chance aux clubs qui voudraient intenter une action. Quelle que soit la décision, ça fera des mécontents".
Des pertes financières considérables
"On table sur une baisse de 30% de notre budget la saison prochaine"
"Aucun club n'échappera à cette crise, pas un. Heureusement qu'on est un club sain, parfaitement géré. Mais dans le domaine financier, on a aussi besoin de visibilité. Le premier effet dans l'immédiat de cette crise, c'est l'annulation de plusieurs de nos manifestations même si contrairement à d'autres clubs, notre budget ne repose pas dessus (6 000 € sur un total de 270 000). Ces manifestations nous servent surtout à entretenir la vie de notre club. Pour nous, à ce niveau, l'impact serait nul. On a aussi évoqué une aide de la Fédération à destination des clubs amateurs mais on ne sait pas exactement de quoi on parle. On est dans le flou. C'est important de le savoir afin de préparer notre budget pour la saison prochaine. C'est en ce moment qu'on travaille sur notre prévisionnel.
Notre modèle est basé à 80% sur les partenariats privés. Pour cette saison, on a encore deux-trois partenaires à encaisser mais à l'instant T, on n'a pas le couteau sous la gorge. Pour la saison prochaine, dans ce contexte, on table sur une baisse de 30% de notre budget. Même si on a la chance d'avoir un commercial de métier qui s'occupe de notre sponsoring, on part sur une base".
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— FOOT NORMAND (@FOOT_NORMAND) April 15, 2020