Il n'y a pas que le foot dans la vie ! En partenariat avec la Région Normandie, la rédaction de FOOT NORMAND a décidé de mettre à l'honneur les athlètes de la Team Normandie en revenant notamment sur les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, tout en se projetant sur leurs nouveaux projets.
Jérémie, il y a six mois, vous tentiez d'effacer la déception de votre sixième place aux Jeux olympiques de Paris. Comment vous sentez-vous en ce début d'année 2025 ?
"Très bien ! Je reviens de Chine où j'ai participé à une compétition de « match racing », une épreuve où les bateaux s'affrontent en un contre un sur l'eau. Je naviguais avec Maxime Mesnil, on a perdu en quart de finale contre des Américains. C'est le type de compétition qui sert d'entraînement pour les règles de course. Quant aux JO, mon moyen de rebondir et de penser à la suite est de me lancer dans un nouveau projet".
De quel nouveau projet parlez-vous ?
"Los Angeles 2028 ! Je me suis associée avec mon ami Jean-Baptiste Bernaz (spécialiste du laser) dans une nouvelle discipline qu'est le 49er. Pour résumer, c'est un bateau plus gros (4,99 m de long) et plus instable qu'en 470 (sa spécialité) que l'on découvre tous les deux. Depuis les Jeux, on n'arrête pas. On a navigué comme des fous pendant 48 jours en l'espace de deux mois".
"C'est la première fois que je fais équipe avec un ami"
Qu'est-ce qui vous a décidé à faire équipe avec Jean-Baptiste Bernaz ?
"On y pensait déjà aux JO de Rio mais c'était un peu tôt pour moi. J'avais encore de belles choses à faire en 407. On est aussi frustrés de ne pas avoir décroché de médaille donc on a l'impression qu'ensemble, on est capable d'y arriver. C'est la première fois que je fais équipe avec un ami, ce n'est pas forcément plus évident mais on se complète. On sort de notre zone de confort".
Qu'est-ce que ce nouveau support va changer dans votre navigation ?
"L'équilibre est beaucoup plus compliqué. Il doit y avoir une grosse synchronisation entre celui qui tient la barre, dirige le bateau et celui qui contrôle les voiles. On est tout le temps debout sur le bateau, ça demande plus d'énergie. Sans personne dessus, le bateau peut se retourner".
Comment se déroulent vos premiers pas dans cette nouvelle discipline ?
"On a fait quelques cabrioles (rires)"
"On a fait quelques cabrioles (rires) ! On se concentre sur la technique pour ne pas dessaler. On prend petit à petit nos marques. C’est passionnant car on apprend et on voit la progression jour après jour. Quand on maîtrisera tous les aspects techniques, on se concentrera sur la tactique et le rôle de chacun sur le bateau".
Jean-Baptiste Bernaz expliquait lui aussi avoir « raté ses Jeux ». C'est à la fois une revanche à prendre ensemble et un énorme défi qui vous attend ?
"Oui, c'est une prise de risque. Je repasse sur un bateau où je dessale et où je me casse la figure. Ça fait 15 ans que je faisais du 470, je pourrais en faire les yeux fermés pendant une heure, je m’en sortirais très bien. Mais les compétences sont transmissibles d’un bateau à l’autre. Jean-Baptiste est très intelligent et rigoureux. J’ai bon espoir qu’on arrive à faire quelque chose de top rapidement. La difficulté, c’est qu’on est des compétiteurs et on aimerait gagner tout de suite. Il faudra être patients".
Quelles sont vos premières échéances ?
"On a une compétition fin mars à Palma de Majorque puis à Hyères en avril. La première grosse échéance, ce sont les championnats d'Europe en Grèce, en juin. Et ensuite, on aura les Mondiaux en octobre à Cagliari où on fera un premier point d'étape. Pendant un an, la priorité est de nous aligner, de ne pas nous blesser, de comprendre comment fonctionne la tactique sur ces bateaux, et ne pas prendre trop de risques s’il y a du vent. Si en plus, on peut être performants, c'est du bonus".
La concurrence promet d'être rude à Los Angeles ?
"Oui. Il y aura un représentant par pays, il faudra que ça soit nous. Les champions du Monde en titre sont Français. Il y a déjà deux équipages français qui ont un très bon niveau. Mais on a entamé les discussions en septembre avec la Fédération française de voile, cela montre qu'on est soutenu. Quand on voit ce qu'ont réussi à faire Charline Picon et Sarah Steyaert aux JO de Paris (l'une était spécialiste de planche à voile, l'autre du laser. Elles ont décroché une médaille de bronze en 49er FX), ça montre que c'est possible. Ça nous booste et nous ouvre des portes".
"Les champions du Monde en titre sont Français"
C'est un peu comme le rêve américain...
"Ça peut être de très beaux Jeux. A priori, le plan d'eau sur place est super. On sait que la culture du sport aux USA n'a rien à voir avec celle dans les autres pays, ça fait rêver. Et puis la médaille aux Jeux olympiques, c'est tout ce qu'il me manque. Ce petit détail pourrait faire la différence dans ma carrière".
Hormis la voile, à quoi ressemble votre quotidien dans la cité phocéenne ?
"Je fais beaucoup de course à pied et de randonnée. A Marseille, j'ai la chance d'avoir les calanques. C'est un terrain de jeu infini. Je peux aussi partir à la montagne le week-end, c'est un luxe. Par contre, j'ai raté le match de Ligue 1 entre l'OM et le HAC pendant les fêtes, j'étais en famille. J'espère pouvoir aller un jour au Vélodrome".
Revenez-vous bientôt en Normandie ?
"Oui, en février. J'irai voir ma famille dans le Perche et mes amis au Havre. D'ailleurs, j'ai suivi à fond l'exploit de Charlie Dalin sur le Vendée Globe. Je suis trop content pour lui. C'est incroyable ce qu'il a réalisé. Il a tout mené d'une main de maître, en pulvérisant le record. Il a tout réussi !"
Propos recueilli par Léa Quinio
Jérémie Mion
- Discipline : Voile
- Âge : 35 ans
- Club : Société des Régates du Havre (depuis 2012)
- Lieu d'entraînement : Pôle France de Marseille
- Palmarès : 7e des JO de Rio 2016 (470 masculin), 11e des JO de Tokyo 2020 (470 masculin), 6e des JO de Paris 2024 (470 mixte), champion d'Europe en 2013 et 2016 (470 double), Champion du Monde en 2018 (470 double), Médaillé de bronze aux Championnats du Monde en 2016 (470 double), Médaillé de bronze aux Championnats d'Europe en 2019 (470 double).