Site icon Foot Normand

"On a peur"

Pour les supporters havrais, les temps sont durs. Privés de stade, comme tous leurs homologues de France, ils assistent impuissants, pour le moment, à la saison plus que mitigée de leur équipe. ©Emmanuel Lelaidier

Pour les supporters havrais, les temps sont durs. Privés de stade, comme tous leurs homologues de France, ils assistent impuissants, pour le moment, à la saison plus que mitigée de leur équipe. ©Emmanuel Lelaidier

« Allo Houston, nous avons un problème !!! » Début décembre, la Fédération des supporters du HAC, émanation et porte-parole des Barbarians, du Kop Ciel et Marine et du Kop Océane, a interpellé Vincent Volpe, non sans une pointe d'humour (le président du Havre partage son temps entre la Normandie et cette ville du Texas). Déployée dans plusieurs lieux de la cité Océane, cette banderole a été accompagnée d'un communiqué où les trois groupes de fans ont fustigé la politique sportive du club doyen. Depuis cette action, leur courroux n'est pas retombé. Il faut dire que la troupe de Paul Le Guen, qui a démarré cette année 2021 par un succès pour une défaite, n'occupe que la 12e place, avec seulement sept points d'avance sur la zone rouge.

"On a l'un des effectifs les plus faibles de Ligue 2, au moins en quantité"

Pour leur défense, entre les blessures, les cas de la Covid-19 et une succession de décisions défavorables du corps arbitral, les coéquipiers de Victor Lekhal n'ont pas été épargnés lors de la phase aller. Autant d'arguments que les supporters « Ciel et Marine » entendent mais qui n'excusent pas tout à leurs yeux. "Avec notre effectif, on savait dès le début que ça serait compliqué. Honnêtement, je pense qu'on a l'un des effectifs plus faibles de Ligue 2, au moins en quantité", estime Johan Vattier.

Pour autant, le président des Barbarians havrais ne rejette pas la responsabilité de cet échec sur les joueurs. "A l'exception du match à Sochaux (J12. défaite 4-0, le 28 novembre), on a conscience qu'ils ne trichent pas, qu'ils donnent le maximum. Mais quand je regarde nos adversaires, ils ont, au minimum, deux mecs qui jouent au ballon. Moi, ces joueurs-là, je ne les vois pas ou plus dans notre équipe". N'oublions pas que l'été dernier, le HAC a perdu gros : Loïc Badé (Lens), Pape Gueye (Marseille), Tino Kadewere (Lyon) pour ne citer que les plus connus. "On a raté un peu le coche la saison passée", regrette ce supporter. "On avait certainement la meilleure équipe sur le papier depuis bien longtemps. On aurait aimé voir ce que ça aurait donné si le championnat avait été au bout*".

Seulement deux saisons en Ligue 1 au 21e siècle

Aujourd'hui, les ambitions de monter à l'étage supérieur (un niveau fréquenté seulement à deux reprises au 21e siècle, en 2002-2003 puis en 2008-2009) voire même de barrage d'accession paraissent loin (avec dix longueurs de retard sur le Top 5). Comme mentionné un peu plus haut, la phase aller a été particulièrement délicate. "Personnellement, le match qui résume notre première partie de saison, c'est la réception de Pau. On gagne 1-0 en inscrivant un but dès la 2' et derrière, on se fait marcher dessus", témoigne Johan Vattier. A l'évocation des matches retour, Johan Vattier redoute le pire. "On a peur", lâche-t-il. "Sauf si deux-trois recrues débarquent au mercato d'hiver mais Paul Le Guen a déjà annoncé que ça ne se produirait pas, on joue le maintien".

"Même si je ne le souhaite pas, je me demande s'il ne faudrait pas qu'on descende afin de faire un bon coup de ménage"

Cette exaspération des fans « Ciel et Marine » dépasse largement le cadre de cet exercice 2020-2021. Pensionnaire de l'antichambre de l'élite pour la 12e année de rang, le HAC éprouve toutes les peines du monde à mettre en application sur le pré ses ambitions. Et aux yeux des supporters, la prise de pouvoir de Vincent Volpe à la tête du club doyen en 2015 n'a pas changé grand-chose. "On a l'impression que le club est léthargique", lance le président des Barbarians. "Et tout le monde semble s'en contenter. Si on monte, tant mieux, si ce n'est pas cas, on s'en fout. Parfois, et même si je ne le souhaite pas, je me demande s'il ne faudrait pas qu'on descende afin de faire un bon coup de ménage et table rase du passé".

L'un des principaux griefs formulés à l'encontre de l'état-major havrais, composé du trio Vincent Volpe - Pierre Wantiez (le directeur général) - Paul Le Guen, concerne le recrutement ou plus exactement l'absence de recrutement. "D'un côté, le président Volpe nous assure que l'argent n'est pas un souci mais de l'autre, on a investi zéro euro pour faire venir des joueurs", pointe Johan Vattier, référence aux arrivées libres de Pierre Gibaud, Nolan Mbemba, Quentin Cornette et Nabil Alioui durant le précédent mercato. Au regard de certains échecs dans un passé assez récent (Alan Dzabana, Ebenezer Assifuah, Faneva Andriatsima…), on peut aussi parfois comprendre la réticence de Vincent Volpe à sortir le carnet de chèques, surtout dans cette période où les incertitudes économiques sont légion (droits TV, Covid-19).

Personne n'exige le départ du président Vincent Volpe

"De mon point de vue, le problème, c'est qu'on recrute des joueurs sur lesquels on n'a pas de certitudes absolues. Un garçon comme Mathias Autret (dont le nom a circulé l'été dernier dans de très nombreux autres clubs, le HAC y compris, avant finalement de s'engager à Auxerre), l'un des cinq meilleurs joueurs de Ligue 2, qui était disponible, c'est mon grand regret. On va me répondre qu'on a un jeune comme Himad Abdelli au même poste, qu'il ne faut pas lui boucher l'avenir mais ce n'est pas interdit de faire jouer les deux ensemble". Le président des Barbarians déplore également que ses dirigeants n'explorent pas plus le marché scandinave surtout après avoir déniché Tino Kadewere en Suède.

"On a l'impression que le projet est monté à l'envers (...) La priorité, ça reste le sportif

"Depuis l'arrivée de Tino, je regarde beaucoup de ballon au Danemark, en Norvège. Je vois des joueurs qui ne feraient pas tâche au HAC". Encore faut-il les convaincre de poser leurs valises en Normandie. Plus facile à dire qu'à faire. Mais là aussi, Johan Vattier trouve que « son » club se montre peu performant pour se mettre en valeur. "Il faut vendre le projet aux joueurs, avancer les arguments pour les convaincre. On a des atouts : nos infrastructures, la ville, la mer, la proximité avec Deauville, le public. Aujourd'hui, peut-être qu'on n'est plus que 3 000 - 4 000 au stade (avant l'instauration des huis clos liés à la crise sanitaire) mais on a un potentiel énorme".

Malgré ce constat sans concession, aucun supporter du HAC n'exige un départ de Vincent Volpe. Bien au contraire. "On a tout à fait conscience de la chance d'avoir un président comme lui et que de nombreuses choses positives ont été réalisées avec le retour du centre d'entraînement en ville, la mise en place de l'hôtel, la construction du restaurant… Pour rien au monde, on ne voudrait changer de président. Maintenant, on a l'impression que le projet est monté à l'envers. Pour nous, il faudrait d'abord construire quelque chose de solide sportivement et derrière investir dans les infrastructures comme l'ont fait Angers, Dijon, Nice… La priorité, ça reste le sportif et ça ne fonctionne pas, et ça ne date pas de cette saison". Désormais, c'est sur le terrain que les fans attendent des réponses.

> L2. J20 - Amiens (9e - 27 points) / Le Havre (12e - 23 points), samedi 16 janvier à 19 heures au Stade Océane.

*La saison dernière, le championnat de L2 avait été définitivement arrêté après la 28e journée à cause de la pandémie de la Covid-19.

"Année après année, on ne prends aucun plaisir à regarder les matches de notre équipe"

Au-delà du classement, Johan Vattier déplore le manque de spectacle quand il assiste, que ce soit au stade (quand cela est autorisé) ou devant sa télé, aux rencontres du HAC. "Je caricature un peu mais aujourd'hui, limite, on prend un but, on sait qu'on a perdu. Quand j'entends certains dire que (Marcelo) Bielsa*, ce n'est pas un bon entraîneur, ça me met en rogne. Je veux des buts, une orgie de foot. De toute façon, les résultats, on n'en a pas, autant voir du spectacle".

*Actuellement à la tête de Leeds en Angleterre, l'entraîneur argentin Marcelo Bielsa a dirigé Marseille et Lille en Ligue 1.

Quitter la version mobile