Avez-vous eu peur de perdre Tino Kadewere dès ce mercato d'hiver ?
"Contractuellement, non. Tino était lié avec nous pour encore deux ans (jusqu'en 2022). Et puis, ce n'est pas un garçon du genre à aller jusqu'au conflit. C'est plutôt sur le plan psychologique qu'on a eu des craintes. Un tel transfert peut perturber même si on ne l'a pas ressenti. S'il l'a été, il a su passer outre. Je n'imagine pas à un moment qu'il n'a pas été inquiet. Il faut le comprendre et tout remettre dans son contexte. Tino fait vivre sa famille (il a perdu son père quand il était adolescent), finance une académie au Zimbabwe... Il a signé un contrat qui va changer sa vie (d'une durée de quatre ans et demi). Même s'il n'est pas à plaindre, ça n'a rien à voir avec ce qu'il gagne chez nous. Il est rentré dans la galaxie des joueurs qui vont disputer la Ligue des Champions".
Au regard des propos du président Vincent Volpe*, on aurait pu imaginer une indemnité financière plus conséquente (12 M€ + 2 de bonus et un pourcentage à la revente fixé à 15%)...
"C'est compliqué de se prononcer. Si à la fin de la saison, Tino finit à 34 buts (il en a inscrit 17 sur la phase aller), qu'est-ce qu'il se passe ? Je ne sais pas. C'est vrai que Tino intéressait des clubs anglais. Maintenant, qui peut me dire quelle va être l'incidence du Brexit sur le marché anglais (le Royaume-Uni ne fait plus partie de l'UE depuis ce 1er février). Et on a aussi fait un choix, celui de respecter la volonté du joueur. Tino nous a fait part d'un choix fort, celui de signer à Lyon. C'est important que les joueurs qui sont formés ou qui jouent au HAC sachent que le club ne sera jamais un obstacle à leur développement et à leur progression".
Dans le sens inverse, Le Havre n'a enregistré aucun renfort cet hiver...
"C'est un choix très fort de Paul (Le Guen). Il ne veut pas d'un vestiaire pléthorique. Il veut qu'un maximum de joueurs se sentent concernés par le match du week-end. On sait que quand on dépasse le nombre de 25, 26 dans un effectif, vous avez des joueurs qui ne le sont plus. Peut-être qu'on aurait été mieux avec tels types de profils plutôt que certains qu'on a. Mais je vais rebondir sur ce que disait Paul, il y a un groupe qui est en train de naître. Ça vaut parfois bien plus qu'un joueur supplémentaire".
On imagine que cette décision est dictée également par le retour de blessure de Victor Lekhal (victime d'une rupture des croisés du genou droit fin mars) et l'émergence de Loïc Badé (19 ans)...
"Victor, c'est mieux qu'une recrue. C'est un top joueur déjà intégré, connaissant parfaitement le club avec une forte identification à nos couleurs. Pour Loïc Badé, on a un bon gamin à tous les niveaux, le joueur comme l'homme. Pourquoi on aurait recruté Loïc Mbe Soh (18 ans) ? Pourtant, encore ce matin (le 31 janvier), le Paris Sant-Germain a fait le forcing pour nous le prêter. Peut-être, qu'à l'instant T, Loïc Mbe Soh est un cran au-dessus mais pourquoi aller chercher un joueur à l'extérieur, ajouter un quatrième défenseur central, un droitier alors qu'on en a déjà deux, du même âge que Loïc (Badé)... Ça n'a pas de logique. Il y a aussi Himad (Abdelli) qui n'a pas du tout joué sur la première partie de saison (un choix sportif) qui nous offre, aujourd'hui, une solution supplémentaire".
Quel est votre sentiment par rapport à l'épisode Wilfried Bony ?
"La seule question qui m'intéresse, et seul le joueur peut y répondre, a-t-il sérieusement envisagé de venir au Havre pour relever ce challenge ? S'il avait d'emblée en tête les chiffres que m'ont communiqués ses agents, il fallait nous le dire tout de suite. On ne se serait jamais compliqués la vie. C'était totalement disproportionné par rapport aux moyens dont on dispose. C'est mon seul petit regret".
Le HAC doit-il se préparer à un départ libre de Pape Gueye dans cinq mois (le capitaine havrais se trouve en fin de contrat au 30 juin) ?
"Bien sûr. Des clubs anglais l'ont courtisé en décembre et en janvier. Il a décidé de ne pas y aller. Une rumeur l'envoie aussi dans un club du Top 4 Français. Maintenant, tant qu'il n'a signé nulle part (dans l'optique de la saison prochaine, il est libre de le faire depuis le 1er janvier), on peut tout imaginer. Si on monte, Pape peut très bien se dire que le meilleur endroit pour découvrir la Ligue 1, c'est avec son club formateur, le brassard autour du bras. Pour que son club formateur soit indemnisé, j'ai connu un joueur qui a prolongé son contrat à quatre mois de son terme (Benoît Pedretti à Sochaux, en 2004). Peut-être que Pape demandera aussi à son nouveau club de nous reverser un pourcentage d'un futur transfert. Mais le plus important, c'est que Pape affiche un comportement irréprochable. Il ne triche pas. Il fait très bien son métier de joueur professionnel".
*"Je ne donnerai suite à aucune proposition qui nous obligerait à nous séparer de Tino cet hiver. Sauf si quelqu'un pose 40 M€ sur la table", avait déclaré le président Vincent Volpe dans les colonnes de Paris-Normandie juste avant la trêve de Noël.