Parapher un contrat professionnel est une chose, jouer en équipe première en est une autre. Evens Joseph (20 ans) et Brice Tutu (21 ans) sont en train d'en faire l'expérience. Depuis le début de la saison, le premier - qui avait signé quelques prestations prometteuses en Ligue 1 (13 matches pour deux titularisations) avant de se perdre et de disparaître des tablettes du duo Mercadal-Courbis dans le sprint final - n'a pas encore effectué la moindre apparition. Ne comptant qu'une rencontre à son actif avec les « pros » avant cet exercice (en Coupe de France, face à Bastia en 1/8e de finale), son coéquipier a disputé, lui, une demi-heure en ouverture sur la pelouse de Sochaux. Sans lui faire offense, son entrée en jeu ne restera pas dans les annales.
Dans la foulée, ces deux attaquants ont même été renvoyés avec la réserve pendant une dizaine de jours, participant à plusieurs oppositions avec l'équipe dirigée par Fabrice Vandeputte. Une sanction ? En interne, Rui Almeida leur a fait passer le message qu'il souhaitait un investissement au quotidien plus conséquent de leur part. "Il faut laisser le temps à ces jeunes de grandir", martèle le coach portugais. "Que ce soit avec nous ou avec la réserve, ils ont besoin de travailler. Et s'ils continuent comme ça tranquillement, on peut les amener à un niveau supérieur. Attention à ne pas leur imposer trop de pression".
Malgré une concurrence dans le secteur offensif réduit, pour le moment, au strict minimum après les départs durant le mercato d'Enzo Crivelli, de Casimir Ninga voire de Yacine Bammou, le patron technique du SMC semble estimer que les principaux intéressés ne sont pas encore aptes pour évoluer au haut niveau. "Ce n'est pas parce qu'on sait faire quelques dribbles qu'on est prêts pour être titulaire en Ligue 2, qui plus est dans une équipe prétendant à la montée. Quelle(s) expérience(s) ont-ils accumulé ? Est-ce qu'ils ont été internationaux chez les jeunes ? Est-il qu'ils ont disputé la Youth League (la Ligue des Champions des U19) ?", interroge Rui Ameida.
La jeunesse ne doit pas constituer une excuse
Avant d'ajouter : "Ce sont à travers ces expériences que les jeunes accumulent de la maturité. Un joueur qui ne compte qu'un match en Ligue 2 et une demi-douzaine en Ligue 1, ce n'est pas suffisant. On a tendance à tout mélanger. La qualité individuelle est importante mais ça ne fait pas tout". Et ne lui parlez pas de la jeunesse comme une excuse. "Ça n'a rien à voir. A 18 ans, un joueur peut évoluer au top niveau", balaye l'entraîneur caennais citant plusieurs exemples rencontrés dans sa carrière. "Il y a trois jours, on m'a appelé pour me parler de mon ancien joueur, (Allan) Saint-Maximim (à Bastia). A 22 ans, il joue à Newcastle".
Et à ceux qui pourraient croire que l'ancien sélectionneur de la Syrie est un peu trop frileux pour lancer un jeune dans le grand bain, il répond : "Dans mon dernier club, j'ai joué avec un joueur de 19 ans (Bryan Mbeumo à Troyes, 10 buts pour trois passes décisives la saison passée en L2, qui vient d'être transféré à Brentford en Championship anglaise). Ça ne m'a posé aucun problème. Ce sont aux joueurs d'apporter les réponses sur le terrain".
En attendant, Evens Joseph et Brice Tutu devraient avoir l'opportunité de se montrer ce mardi soir à l'occasion du 1er tour de la Coupe de la Ligue. Malik Tchokounté et Jan Repas étant blessés, Herman Moussaki (20 ans), un autre jeune qui, lui, bénéficie d'un temps de jeu important (229' en trois journées), est le seul titulaire actuel valide. Le préserver pour le championnat est une possibilité. S'il conserve son système en 5-3-2, Rui Almeida pourrait les associer sur le front de l'attaque contre Nancy. Alors que les dirigeants normands travaillent toujours sur le recrutement de deux ou trois éléments offensifs, cette chance ne se présentera peut-être pas deux fois. A eux de ne pas la gâcher.