Il a tenu parole. Vendredi, en conférence de presse, à la suite de son entrevue avec Pierre-Antoine Capton, Stéphane Moulin avait annoncé qu’il prendrait son temps pour trancher sur son avenir, comme l’y avait invité le président du Conseil de surveillance du Stade Malherbe, "mais pas trop non plus car il y a une saison à préparer, en priorité pour le club". Finalement, sa réflexion a été relativement rapide. Comme révélé par nos confrères d’Ouest-France avant que le SMC ne l’officialise quelques minutes plus tard, Stéphane Moulin ne sera plus l’entraîneur des « Rouge et Bleu » la saison prochaine malgré un contrat qui courrait pourtant jusqu’en 2024. Une décision, sa décision qui n’a rien à voir avec les futurs moyens sportifs dont les Caennais disposeront. Elle n’a pas non plus un lien avec sa situation personnelle, lui qui a eu l’immense douleur de perdre son épouse au mois de janvier. Non, il s’agit bien d’une question d’homme.
La fracture avec Olivier Pickeu est apparemment trop profonde pour que les deux camps poursuivent leur collaboration. L’image d’Epinal d’une direction et d’un staff soudés car ayant travaillé pendant 16 ans ensemble dont 14 à Angers vient de voler en éclats. Outre Stéphane Moulin, le club normand va aussi perdre une grande partie de son staff. Fidèles au technicien angevin, ses adjoints Serge Le Dizet et Patrice Sauvaget s’apprêtent également à faire leurs valises. Sans oublier Philippe Leclerc, le recruteur n°1, ami proche du futur-ex-coach du SMC depuis 25 ans. Le projet d’une accession sous trois ans vendu par Olivier Pickeu à l’arrivée de tout ce joli petit monde en 2021 est, cette fois-ci, bel et bien, enterré. De toute façon, de nombreux supporters, observateurs, partenaires n’y croyaient plus depuis longtemps ; le football étant un perpétuel recommencement, saison après saison, surtout en Ligue 2.
Un terrible désaveu pour le SMC du duo Pickeu-Capton
Pour « ce » Stade Malherbe présidé par Olivier Pickeu et porté par Pierre-Antoine Capton (qui, en dépit de son amour pour le maillot « Rouge et Bleu », doit peut-être parfois se demander ce qu’il est venu faire dans cette galère), il s’agit, quoi qu’on en dise, d’un terrible désaveu. Le départ de Stéphane Moulin et de son staff constitue un très mauvais signal envoyé à l’environnement du club caennais (supporters, partenaires, élus…) ainsi qu’aux joueurs de l’effectif. Certains pourraient être tentés de conditionner la suite de leur carrière à la décision de leur futur-ex-coach (Alexandre Mendy, Romain Thomas…). Bien sûr, tout cela ne présage en rien de l’avenir sportif du SMC. Le football est tellement étrange. Peut-être que le successeur de Stéphane Moulin (le nom de Bruno Irles est évoqué) parviendra à faire monter le club caennais en Ligue 1 dès la saison prochaine. Après tout, le voisin havrais est sur le point de montrer que c’est possible alors qu'il a tout changé ou presque l’été dernier.
Tout ce que l’on sait à l’instant T pour le Stade Malherbe, c’est ce qu’il a perdu : un entraîneur qui a fait passer son équipe de la 17e à la quatrième place de Ligue 2 avec des moyens financiers plus que limités. Ses plus farouches détracteurs pourront toujours critiquer ses choix de joueurs, ses options tactiques, le fait qu’il n’ait pas assez donné sa chance aux jeunes… Toujours est-il que les résultats plaident plutôt en sa faveur. En même temps, ceux qui se posent la question de savoir si le club normand est capable de faire mieux avec un autre technicien à sa tête vont être rapidement fixés.
Un climat tendu, Oaktree, le mercato...
Le départ de Stéphane Moulin s’inscrit dans un contexte général assez préoccupant pour le Stade Malherbe malgré les résultats plus que corrects des professionnels (5e de Ligue 2 après 35 journées). Les habitués du bâtiment administratif et du centre de formation décrivent en interne une ambiance tendue, lourde, pesante comme jamais ils n’ont connu. A tous les niveaux du club, des sources de frictions sont apparues au fil de la saison : formation, féminine, commercial… Le tout avec cette épée de Damoclès au-dessus de la tête du SMC avec ce changement d’actionnaire principal annoncé. Toutefois, même si un cabinet anglais spécialisé dans ce domaine a été mandaté pour trouver de nouveaux investisseurs, Oaktree ne devrait pas quitter le paysage caennais dès demain. Le fonds américain, qui a toujours fait face à ses obligations devant la DNCG, va de nouveau assurer le passage devant le gendarme financier du football français courant juin.
Encore une fois, le club normand devrait présenter un déficit structurel d'environ 6 M€. Pour le combler, les dirigeants devront vendre sauf que les valeurs marchandes ne sont pas légion au sein de l'effectif « Rouge et Bleu ». Pour renflouer les caisses : Alexandre Mendy (2024), Norman Bassette (2025) et Ali Abdi (2026) paraissent comme les profils les plus évidents sachant qu'Ibrahim Cissé va, lui, partir libre. Dans l'autre sens, il faudra se montrer malin pour se renforcer en misant sur des éléments en fin de contrat, prêtés ou avec une indemnité de transfert extrêmement faible. Dans ces conditions et au regard de la concurrence, accrocher le Top 5 constituerait une sacrée performance.