Foot Normand

Entre travail et football, l'équilibre parfait de Morgan Hardoin

S'il poursuit sa carrière de footballeur avec l'AG Caen (N3), Morgan Hardoin est depuis 2019 coach sportif. Le latéral droit exerce dans deux salles : A Caen la forme et Greenfit. ©Damien Deslandes

Une décennie au Stade Malherbe

"Une fois qu’on est parti, on se rend compte qu’on était des privilégiés"

Repéré très tôt par le Stade Malherbe, à l’époque où il défendait les couleurs de Bessin Nord, Morgan Hardoin a intégré les « Rouge et Bleu » dès l’âge de dix ans. Il y est resté une décennie, frappant aux portes des professionnels bien qu’il n’ait jamais joué avec l’équipe fanion. "Mon premier entraînement avec les pros, j’avais 16 ans. Je suis le premier de la génération 1996 (Rosario Latouchent, Adama Diakhaby, Valentin Voisin…) à en avoir fait un". Forcément, quand on s’approche aussi près de son rêve de gamin, on ressent une pointe de regret de ne pas avoir franchi le cap. "Tu te dis que tu n’étais pas si loin. J’encaissais la charge d’entraînement, je n’étais pas blessé, mes prestations n’étaient pas si mauvaises…"

Si la déception de ne pas être passé « pro » dans son club formateur est légitime, le latéral droit de l’Avant-Garde se souvient surtout de son passage au SMC avec nostalgie. "Je pense qu’on ne profite pas assez de chaque instant. Une fois qu’on est parti, on se rend compte qu’on était des privilégiés". Aujourd’hui, le coach sportif mesure la chance qu’il a eue. "Ça m’a permis de côtoyer du beau monde. J’ai évolué avec des joueurs qui sont maintenant très loin comme Thomas Lemar. Je me suis entraîné quelquefois avec N’Golo Kanté. Emiliano Sala a également disputé un match avec nous, en réserve, contre Le Havre". Il y a bien entendu les coéquipiers mais aussi les adversaires rencontrés dans les catégories de jeunes. "Quand tu es à la formation, tu affrontes des mecs qui vont exploser par la suite. Kingsley Coman, avec le PSG, on voyait qu’il était au-dessus". D’autres se sont révélés d’agréables surprises. "Même s’il était régulièrement surclassé avec Lille, tu ne te disais pas que Benjamin Pavard gagnerait la Coupe du Monde un jour".

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Repéré très tôt, quand il défendait les couleurs de Bessin Nord, son premier club, Morgan Hardoin a passé dix ans au Stade Malherbe, fréquentant toutes les catégories de jeunes jusqu'à la réserve.

La difficulté de rebondir dans le monde « pro »

"Mon agent ne m’a plus donné signe de vie"

Malgré ses dix années de présence au Stade Malherbe, Morgan Hardoin a pu constater combien il était difficile de rebondir quand on n’a pas été conservé par son club formateur. Et pourtant… "Lors du rendez-vous où j’apprends que je ne suis pas gardé, Francis De Taddeo (le directeur du centre de formation de l’époque) m’assure que je ne vais pas avoir de mal à signer en N1". La réalité va se révéler un brin différente. Surtout qu’après deux essais infructueux à Guingamp (L1) et Niort (L2), son agent le plante. "Il ne m’a plus donné signe de vie. Tu te retrouves sans rien". Pas évident à gérer pour un jeune homme de 20 ans en dépit du soutien de sa famille. D’ailleurs, si cette situation se reproduisait aujourd’hui, le principal intéressé ne l’aborderait pas de la même façon. "Je n’avais pas autant d’assurance que maintenant. Je ne me voyais pas gratter à la porte de tel ou tel coach pour jouer".

Sans solution pour la suite de sa carrière, Morgan Hardoin reçoit un coup de téléphone qui va tout changer. "Philippe Clément me propose de le rejoindre à Dives. Il m’explique que l’idée, c’est de faire une saison en CFA2, pour continuer à me montrer et m’accompagner pour trouver un club plus haut". L’alchimie entre le défenseur et le SUDC s’opère à merveille. "Je fais une super saison, je m’épanouis…". Des performances qui ne passent pas inaperçues au point de recevoir un appel de son « fameux » agent qui l’avait abandonné un an auparavant. "Je l’ai envoyé ch… direct". S’il est à deux doigts de s’engager avec Bergerac (N2) cet été-là, l’ex-Malherbiste poursuit l’aventure avec Dives-Cabourg. S’en suivront des expériences à Mondeville, Alençon et l’AG Caen (toutes en N3) où il évolue désormais depuis 2019.

La reconversion

"Après Mondeville, c’était clair dans ma tête que je n’irais pas plus haut"

Adepte du chiffre deux, lui qui est né un 2 février, Morgan Hardoin s’était fixé une date limite concernant son avenir dans le monde du ballon rond. "Je me suis toujours dit que si à 22 ans, je n’étais pas pro, je passais à autre chose. C’est pourquoi après mon passage à Mondeville, c’était clair dans ma tête que je n’irais pas plus haut". Réfléchi, le latéral droit a une idée très précise de son futur métier. "A ce moment-là, mon grand frère, Maxence*, était préparateur physique. J’aimais bien ce qu’il faisait. La perspective de faire faire du sport aux autres me séduisait. J’avais déjà eu deux expériences d’éducateur avec les gamins à Malherbe et à Dives".

Alors qu’il défend les couleurs d’Alençon, Morgan Hardoin entame une formation de coach sportif d’un an. Dans ce cadre, il effectue un stage dans la salle « A Caen la forme ». "A la fin de mon stage, Guillaume (Travers), le patron, m’a proposé de bosser avec lui. J’ai dit oui direct". Aujourd’hui, disposant du statut d’auto-entrepreneur, l’enfant de Sommervieu dans le Bessin exerce dans deux structures (avec également Greenfit à Hérouville qui appartient aux mêmes propriétaires) mais également pour des entreprises et des particuliers. "J’ai trouvé un super équilibre. Ce travail me laisse la possibilité de continuer à m’entraîner et le fait de jouer en N3 me permet d’avoir une activité professionnelle à côté. Les deux se complètent parfaitement".

*Spécialiste du demi-fond, Maxence Hardoin, qui a raccroché ses pointes cet été après avoir participé au championnat de France à Caen, possède un record personnel de 8’42 sur 3 000 m steeple.

Après avoir suivi une formation spécifique pendant 12 mois, Morgan Hardoin est coach sportif depuis quelques années, aussi bien dans les salles que pour les entreprise et les particuliers. ©Damien Deslandes

Son rapport au foot

"J’ai fait trop de sacrifices pour que j’arrête maintenant"

S’il officie comme coach sportif, pas question pour Morgan Hardoin de raccrocher les crampons. "Je donne encore la priorité au foot. C’est une part importante de ma vie". Entre les entraînements, les déplacements et les matches, il y consacre 20 à 25 heures par semaine. Une activité, à ce niveau, en N3, rémunérée mais qui ne permet pas d’en vivre à 100%, d’où la nécessité de travailler en parallèle. Mais si l’ex-pensionnaire du centre de formation du SMC continue de taper dans le ballon rond, ce n’est pas pour une affaire d’argent. "J’ai fait trop de sacrifices et mes parents (Fabienne et Hervé) ont consenti trop d’efforts pour que j’arrête maintenant. Avec ma famille, on a toujours habité dans la région de Bayeux. Quand j’étais à Malherbe, pour aller aux entraînements, il y avait une heure de route aller-retour".

Et puis Morgan Hardoin est avant tout un passionné. D’ailleurs, d’ici quelques années, il compte boucler la boucle en retournant à Bessin Nord, le club de ses débuts. "C’est sûr et certain". Et quand l’heure de la « retraite » de joueur aura sonné, il songe à s’asseoir sur un banc. "J’aimerais bien entraîner", confie celui qui envisage de passer ses diplômes. Une fibre de technicien que lui ont transmis deux de ses anciens éducateurs au Stade Malherbe : Thierry Traoré et Frank Dechaume (respectivement en poste à Mondeville et à La Maladrerie). "On parlait de l’équipe, on discutait souvent tactique. Ça m’a donné envie". Maîtrisant tous les codes de cet univers si particulier, nul doute qu’il saura tirer son épingle du jeu.

> Coupe de France. 4e tour - Saint-Lô (N3) / AG Caen (N3), samedi 24 septembre à 18 heures au Stade Louis-Villemer.

 

Morgan Hardoin

> Né le 2 février 1996 à Bayeux (Calvados).

Défenseur-latéral droit. Droitier.

Parcours : Sommervieu (jusqu’en 2006, équipes de jeunes), SM Caen (2006-2016, jusqu’en CFA2), Dives (2016-décembre 2017, CFA2), Mondeville (janvier-juin 2018, N3), Alençon (2018-2019, N3, AG Caen (2019-…, N3).

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