Si elle a forcément été acquise dans des conditions particulières (à cause de cette pandémie de Covid-19), la promotion de la réserve du Stade Malherbe à l'étage supérieur ne souffre d'aucune contestation. "Je pense qu'elle est méritée", estime le coach Fabrice Vandeputte, de retour à la tête de la « B » caennaise en début de saison après une parenthèse dans le staff des « pros » lors de l'exercice précédent. Auteurs d'un parcours sans-faute à Venoix (neuf succès en autant de sorties à domicile), les partenaires de Thomas Callens, à l'arrêt du championnat (le 13 mars), disposaient de neuf points d'avance sur leur plus proche poursuivant (Evreux) avec, certes, une rencontre de plus au compteur. Et si huit journées figuraient encore au calendrier, sans oublier les innombrables matches en retard, difficile d'imaginer la relève « Rouge et Bleu » se faire doubler dans l'ultime ligne droite.
Pour autant, cette accession en National 2 était tout sauf programmée. L'été dernier, la réserve du SMC était repartie sur un nouveau cycle "avec un groupe très jeune", dixit Fabrice Vandeputte. Mais avec une génération (avec des garçons nés pour leur grande majorité entre 2000 et 2002) qui avait déjà fait ses preuves dans les catégories d'âge inférieures (finaliste du championnat de France U19 en 2018, demi-finaliste en 2019). "Il y a eu aussi une bonne osmose avec les pros qui sont redescendus", souligne un entraîneur normand qui a utilisé pas moins de 41 éléments différents !
« Parmi cette génération, de nombreux garçons sont issus de la région, sont passés par l'école de foot, la préfo »
Sous contrat jusqu'en 2021, Fabrice Vandeputte, qui devrait toujours être aux commandes de la réserve du Stade Malherbe la saison prochaine, n'a pas manqué de souligner l'aspect régional de cette accession en N2. "Une montée qui récompense l'ensemble du club, tout le travail qui a été réalisé en amont, tous les acteurs : les joueurs, le staff, les accompagnants et tous les éducateurs qui ont entraîné les garçons auparavant".
Si elle s'est montrée performante sur le terrain, la « B » n'en a pas oublié sa mission prioritaire : accompagner des joueurs vers l'équipe première. Cette saison, Nicholas Gioacchini est devenu un titulaire indiscutable dans le onze de Pascal Dupraz. Alexis Beka Beka, Kélian Nsona et Andréas Hountondji ont également fêté leur baptême du feu chez les « pros ». "L'arrivée de Pascal Dupraz a constitué une chance pour notre centre de formation. On a des garçons de qualité. Et il s'est appuyé dessus. Ça valorise tout le travail réalisé par l'ensemble des éducateurs de la structure", se félicite le directeur Stéphane Nado.
Toutefois, désormais, le plus dur commence pour cette jeune classe malherbiste. Le championnat de N2 n'ayant strictement rien de comparable avec son homologue de N3. "Pour moi, il y a au moins deux divisions d'écart", confirme Abasse Ba. Un technicien bien placé pour savoir de quoi il parle puisqu'il a dirigé la réserve du HAC durant deux ans à ce niveau jusqu'à sa relégation en 2019. "Le N2 n'a d'amateur que le nom. Quand vous regardez les effectifs, vous retrouvez des anciens joueurs de Ligue 2 ou de National (N1), des garçons qui ont fréquenté un centre de formation. Dans ces équipes, vous avez aussi beaucoup de contrats fédéraux. Ce sont donc des joueurs qui ne font que du foot, qui vivent de cette activité", décrypte le responsable de la « B » havraise.
Un degré de difficulté dont est parfaitement conscient Stéphane Nado, le directeur du centre de formation du SMC : "Ce championnat constituera un excellent révélateur pour nos garçons. Maintenant, il ne faut pas se mentir, ça sera un championnat compliqué. On se rapproche du haut niveau. Les garçons devront s'adapter rapidement". Une tâche loin d'être aisée. D'ailleurs, très rares sont les réserves professionnelles à tirer leur épingle du jeu dans cette division. Sur le prochain exercice (2020-2021), elles ne seront que 12 à y évoluer dont potentiellement trois de Ligue 2 (lire encadré ci-dessous). Rien que cette saison, Lille, Montpellier, Saint-Etienne et Nîmes sont tombés en N3. Excusez du peu.
A quel niveau évolueront les réserves « pros » en 2020-2021 ?
> N2 (7 L1 - 5 L2) : Angers, Auxerre, SM Caen, Guingamp, Lens, Lorient, Lyon, Marseille, Metz, Monaco, Nantes, Reims
> N3 (13 L1 - 13 L2) : AC Ajaccio, Amiens, Bordeaux, Brest, Chambly, Châteauroux, Clermont, Dijon, Le Havre, Le Mans, Lille, Montpellier, Nice, Nîmes, Niort, Orléans, Paris FC, Paris SG, Rennes, Rodez, Saint-Etienne, Sochaux, Strasbourg, Toulouse, Troyes, Valenciennes
> R1 (2 L2) : Grenoble, Nancy
*En doré, les clubs de L1. En noir, les clubs de L2. Les niveaux (L1-L2) correspondent à ceux de cette saison.
Si une aventure en N2 se révèle incontestablement formatrice, attention à ce qu'elle ne se transforme pas en cauchemar. Car elle peut laisser des traces à l'intérieur d'un groupe. "Ce n'est jamais agréable d'enchaîner des défaites. Ça peut avoir des conséquences avec une perte de confiance pour vos joueurs ainsi que pour le staff", prévient Abasse Ba. Pour exister à ce niveau, des clubs n'hésitent d'ailleurs pas à recruter plusieurs éléments aguerris à destination spécifiquement de leur réserve. Avant de décider de se passer de sa « B » il y a un an, le Paris Saint-Germain avait souvent recours à cette politique. "Si vous ne partez qu'avec des jeunes en N2, ça me paraît compliqué. Après, tout dépend si vous disposez d'un effectif professionnel assez large pour faire redescendre quelques joueurs chaque week-end ou si vous avez les moyens de recruter trois-quatre garçons plus matures pour encadrer votre réserve", expose le coach des « Ciel et Marine ».
Au Stade Malherbe, un club qui pourrait enregistrer les retours de prêt de trois éléments ayant évolué à ce niveau cette saison (Brice Tutu à Bastia, Marvin Golitin et Jad Mouaddib à Granville), on a déjà tranché. "A moins d'une opportunité, on repartira exactement avec le même groupe. Si l'aspect économique rentre, bien entendu, en ligne de compte, il est hors de question de recruter des joueurs de 22, 23 ou 24 ans pour accompagner nos garçons. Et je peux vous dire qu'hormis une ou deux exceptions, nous avons déjà nos 22-23 joueurs sous contrat", affirme le directeur Stéphane Nado. C'est donc sans aide extérieure que les jeunes pousses du SMC plongeront dans le grand bain du N2.
Avec un effectif quai-identique
A notre connaissance, le défenseur Thomas Chesnel est, à ce jour, le seul joueur de l'effectif de la réserve qui n'a pas été conservé par le Stade Malherbe.
Comme l'a indiqué Stéphane Nado, la réserve du Stade Malherbe, même promue en N2, devrait repartir avec un effectif quasi-identique. A ce jour, seul Thomas Chesnel (défenseur central), pisté par les Italiens de la Fiorentina il y a deux ans, n'a pas été conservé. Ayant signé un contrat amateur d'un an l'été dernier, le gardien Sullivan Péan, les défenseurs Corentin Cal et Tony Villeray pourraient prolonger l'aventure sous le maillot « Rouge et Bleu ». D'ailleurs, certains jeunes pourraient être intégrés définitivement à l'effectif « pro » (Tony Villeray ? Loup Hervieu ?). Sinon, à l'exception du milieu Yaya Touré, tous les autres joueurs de l'équipe « B » sont encore liés avec le SMC :
> Théo Barré, Allan Bidard, Pierrick Mouniama et Luca Boudonnet (tous les quatre sous contrat stagiaire) jusqu'en 2021,
> Andréas Hountondji, Robin Legendre, Ilyes Najim, Alexis Beka Beka* (tous les quatre sous contrat stagiaire) jusqu'en 2022. Le gardien Yassine Gueddar et le Suédois Zeidane Inoussa disposent également d'un contrat stagiaire dont la durée n'a pas été communiquée,
> Pathy Malumandsoko, Loup Hervieu, Godson Kyeremeh, Aloys Fouda et Stephen Ewangue (tous les cinq sous contrat élite) jusqu'en 2023,
> Johann Lepenant, Kélian Nsona et Ayoub Jabbari (tous les trois sous contrat professionnel) jusqu'en 2022 pour les deux premiers, jusqu'en 2023 pour le dernier cité.
*Avant le confinement, la direction du Stade Malherbe avait entamé des négociations pour faire parapher son premier contrat professionnel à Alexis Beka Beka (cinq apparitions dont trois comme titulaire en L2).