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Pour Malherbe, Oaktree a parfaitement joué le rôle de banquier

Oaktree sera donc resté quatre ans à la tête du Stade Malherbe, permettant au club normand de passer à chaque fois l'obstacle de la DNCG sans parvenir à le développer sur le plan économique. ©Damien Deslandes

Oaktree sera donc resté quatre ans à la tête du Stade Malherbe, permettant au club normand de passer à chaque fois l'obstacle de la DNCG sans parvenir à le développer sur le plan économique. ©Damien Deslandes

Une page vient de se tourner au Stade Malherbe. Quatre ans après son arrivée à la tête du club caennais, via Pierre-Antoine Capton (PAC), Oaktree n'en est plus le propriétaire. Il s'apprête à vendre sa participation largement majoritaire (80%) à la famille de Kylian Mbappé, à travers Interconnected Ventures, la société qui gère les droits d'images de l'international français, et sa filiale d'investissement Coalition Capital. C'était sa volonté. Elle ne date pas d'hier puisqu'il a fait part de son intention de se désengager depuis 18 mois. Au final, le fonds américain aura respecté la feuille de route qu'il s'était fixé le jour où il est devenu actionnaire principal du SMC. "On s'inscrit sur un projet de quatre-cinq ans et plus si besoin", nous avait confié Vincent Catherine, son représentant, en décembre 2020. Ça ne sera pas plus. Il faut dire qu'entre la chute vertigineuse des droits TV en France, la crise sanitaire qui a frappé notre pays pendant deux ans et des résultats sportifs loin d'être extraordinaires, le contexte n'est plus aussi favorable qu'en 2020.

Quelle image garderont les supporters « Rouge et Bleu » de ce passage ? Peut-être pas beaucoup tant Oaktree s'est montré discret, y compris médiatiquement. Parmi les actionnaires, PAC, Normand d'origine et figure de proue de ce projet de reprise en 2020, ayant été propulsé en première ligne, prenant à la fois la lumière et les coups. Surtout, le fonds d'investissement a semblé (volontairement) en retrait sur les principales décisions sportives. S'il a été consulté et donné son aval sur chacune d'entre elle, il n'a jamais apparu comme une force de proposition que ce soit sur la désignation des coachs (Stéphane Moulin, Jean-Marc Furlan, Nicolas Seube) ou même sur la nomination d'Olivier Pickeu en tant que président à l'époque. "C'est Pierre-Antoine qui nous a présenté Olivier. Un choix qu'on a validé", nous expliquait Vincent Catherine il y a trois ans et demi. "Sportivement, on se repose sur lui et ses équipes. Décider quel attaquant ou quel défenseur on veut, ce n'est absolument pas de mon ressort et ça ne doit jamais l'être".

Des engagements FINANCIERS tenus jusqu’au bout devanT la DNCG

Avec la prise de contrôle du Stade Malherbe par Kylian Mbappé et son entourage, c'est l'une des choses qui risque le plus de changer avec un propriétaire nettement plus interventionniste. On imagine mal le clan de l'attaquant du Real Madrid racheter un club pour demeurer en retrait. Pour autant, il ne faut pas croire que le rôle d'Oaktree n'a pas été considérable ces quatre dernières saisons. Pierre-Antoine Capton l'a souvent rappelé. Dès son intronisation, le fonds américain a sans doute évite le pire au SMC. D'ailleurs, il convient de noter qu'Oaktree a tenu ses engagements financiers, notamment auprès de la DNCG (Direction nationale de contrôle et de gestion) jusqu'au bout. A l'exception de la première saison de sa gouvernance (2020-2021), où il a dû composer avec l'héritage de la direction précédente, le Stade Malherbe n'a pas reçu la moindre sanction de la part du gendarme financier du football français.

17 M€ de pertes couvertes en quatre ans

Et pourtant, il y aurait eu de quoi... En se basant sur les chiffres communiqués par les rapports de la DNCG, le Stade Malherbe a affiché 17 M€ de pertes sur cette période (2020-2024), dont les deux tiers concédés en 2020-2021*, à l'arrivée d'Oaktree et en pleine crise sanitaire. 17 M€ soit, peu ou prou, la valorisation effectuée selon différentes sources pour l’achat du club normand par la famille Mbappé (entre 15 et 20 M€). Sans les garanties apportées par le fond d'investissement, jamais le SMC n'aurait franchi l'obstacle du gendarme financier. Dernier exemple en date, au mois de juin avec l'augmentation de capital de 5 M€ pour couvrir le déficit de l'exercice 2023-2024 (résultat net de - 4,5 M€). Cette augmentation de capital aurait été assumée à hauteur de leur engagement dans l'actionnariat par Pierre-Antoine Capton et Oaktree ; 1,25 M€ par le président du directoire de Mediawan, le reste à la charge des Américains.

Pas plus de 2 M€ investis sur le marché des transferts depuis 2020

Toutefois, si l'ex-actionnaire majoritaire a évité au Stade Malherbe toute déconvenue devant la DNCG, ils ne lui ont pas permis de se développer sur le plan footballistique. Depuis 2020, l'Etat-major « Rouge et Bleu » a été extrêmement peu actif au niveau des achats. En quatre ans, le SMC n’a pas déboursé en tout plus de 2 M€ ! Bilal Brahimi, avec les 700 000 € pour le faire venir de Dunkerque à l’été 2022, se révélant être le joueur le plus onéreux sur cette période. On verra, si avec le clan Mbappé aux affaires, le club caennais se montrera plus dépensier sur le marché des transferts, à commencer par celui-ci, au point mort jusqu’à présent. C’est l’une des principales interrogations entourant ce nouveau projet de reprise. De cette force de frappe sur le front du mercato dépend peut-être les ambitions de Malherbe.

Par ailleurs, le principal bémol qu’on peut pointer à l’encontre d’Oaktree, même s’il partage cette responsabilité avec Pierre-Antoine Capton et l’ancien président Olivier Pickeu, c’est que le fonds d’investissement ne sera jamais parvenu à déterminer un modèle économique viable pour le SMC. Pourtant, on a cru lors de l’exercice 2021-2022 que le club normand se trouvait sur le bon chemin avec notamment un déficit structurel (avant la balance des transferts) inférieur à 5 M€, une masse salariale ramenée sous la barre des 10 M€ et un résultat net positif d’1,34 M€. Mais la saison suivante, tous ses efforts ont volé en éclats avec un déficit structurel doublé (9,14 M€) et une masse salariale qui a bondi de 58% (14,71 M€), égale à l’ensemble de la totalité des revenus hors transferts (!). A croire que les dirigeants caennais ont fait tapis à l’été 2022 dans l’espoir que cela débouche sur une montée en Ligue 1. Néanmoins, les recrutements de Romain Thomas, Anthony Mandrea ou encore Hianga'a Mbock (en prêt), entre autres, ne peuvent expliquer à eux seuls cette augmentation totalement démesurée. Est-ce que les « Mbappé » accepteront eux-aussi ce train de vie, et donc d’éponger les pertes qui vont avec sachant que les revenus issus des droits TV vont être divisés par deux (4,87 M€ touchés en 2023), ou parviendront-ils à restructurer le Stade Malherbe en profondeur ? Réponse dans les prochains mois.

*Il convient de signaler qu'entre les saisons 2019-2020, sous la présidence de Fabrice Clément, et 2020-2021, la première sous la direction d'Oaktree, les fonds propres du SM Caen sont passés de 12,9 M€ à 5,1 M€ (pour remonter en 2022-2023 à 7,2 M€). Il n'est pas exclu que cette somme ait été utilisée pour combler une partie du déficit du club normand.

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