Quatre entraîneurs (Fabien Mercadal, Rolland Courbis, Rui Almeida et Pascal Dupraz), trois staffs techniques, un directeur général (Arnaud Tanguy à la place de Xavier Gravelaine, qui disposait d'un CDI), un directeur sportif (Yohan Eudeline succédant à Alain Cavéglia, également sous contrat en CDI), des effectifs renouvelés à presque 100% deux étés de suite... Depuis deux ans, le Stade Malherbe, relégué en Ligue 2 en mai 2019, s'est signalé par une instabilité à tous les étages. Des mouvements qui engendrent des coûts et qui soulèvent forcément des interrogations sur la situation financière du club normand. A titre d'exemple, la rupture de contrat de Fabien Mercadal aurait été facturée 700 000 € au SMC. La « pige » de quatre mois de Rolland Courbis 1 M€ ! Une liste de « dépenses » loin d'être exhaustive.
"Il n'y a pas d'inquiétude sur le budget, celui de la saison dernière comme celui de cette saison. On a zéro problème pour finir la saison. On va peut-être même mieux la finir que ce que l'on pensait au départ", balaie le président Fabrice Clément. "Il n'y a pas de trou", confirment conjointement Pierre Esnée et Jean-Claude Lechanoine, respectivement président du SMC 10 et du Conseil de surveillance de la SASP. "Le club vit bien. Pour nous, il n'y a pas vraiment de sujet", ajoute Pierre Esnée. "Maintenant, si la question c'est, est-ce qu'on va avoir besoin de vendre des joueurs pour équilibrer le budget ? La réponse est oui", précise Fabrice Clément.
Rien de révolutionnaire. Comme la quasi-totalité des clubs professionnels français, Ligue 1 et Ligue 2 confondues, le Stade Malherbe affiche, au terme de chaque exercice, un déficit structurel ; c'est-à-dire avant le résultat des opérations de mutations. Il était, d'ailleurs, légèrement supérieur à 8 M€ en clôture de la saison 2017-2018, le dernier sous la gouvernance de Jean-François Fortin (équilibré par un bénéfice de 8,6 M€ sur les transferts). Reste à savoir si depuis, ce résultat d'exploitation a augmenté ou diminué. Selon nos informations, il manquerait aux alentours de 6 M€ pour boucler le budget de cette saison.
Des fonds propres comme garanties devant la DNCG
Pour le combler, l'état-major caennais, qui aurait pris des engagements devant la DNCG (réduire ce déficit d'environ 2,5 M€), ne dispose pas de 36 solutions. N'étant pas parvenu à réduire au mercato d'hiver une masse salariale beaucoup trop importante (seul Baisama Sankoh a fait ses valises), il doit procéder à des ventes d'ici au 30 juin, date de clôture de l'exercice comptable pour 2019-2020. Sauf que les éléments dans l'effectif possédant une valeur marchande ne sont pas légion. On peut citer, sans grand risque de se tromper, Jessy Deminguet, Caleb Zady Sery voire Nicholas Gioacchini. "Le véritable actif d'un club, ce sont ses joueurs", martèle pourtant Fabrice Clément, bien conscient également de la nécessité de réduire la masse salariale dans un avenir proche. "C'est indispensable".
Si les dirigeants se montrent aussi sereins sur la pérennité économique du SMC, c'est peut-être aussi parce qu'ils peuvent s'appuyer sur des fonds propres à hauteur de 11,7 M€ (selon le rapport de la DNCG 2017-2018). "Est-ce que ces fonds propres constituent une garantie ? Bien sûr", ne passe pas par quatre chemins Pierre Esnée. "Quand tu accuses un déficit, tu peux puiser dedans". "Cela permet d'amortir une descente en Ligue 2", enchaîne Jean-Claude Lechanoine. Si ce pécule donne une certaine visibilité financière aux actionnaires durant un laps de temps, quid quand cette réserve sera tarie ?
Bien sûr, avec le nouveau contrat des droits TV*, le Stade Malherbe, comme ses 19 autres camarades de jeu en L2, devrait voir ses revenus augmenter, de l'ordre de 2 M€. "Sur un budget de 17 M€, ça change la donne", assure Fabrice Clément. Est-ce que cela sera suffisant ? Pas certain. "Depuis 20 ans, les actionnaires ont toujours fait face. S'il y a besoin, on remettra au pot", affirme Pierre Esnée. Et si demain un repreneur se présentait avec son chéquier pour racheter une majorité du capital ? "Ça sera NON. Le club n'est pas à vendre", répond immédiatement Jean-Claude Lechanoine. "On veut conserver notre modèle actuel (regroupant 13 actionnaires principaux, tous des chefs d'entreprise normands, qui détiennent 80% du capital du club à parts égales)". Reste à savoir si celui-ci est le meilleur pour l'avenir du Stade Malherbe ?
*Pour la période 2020-2024, Mediapro et beIN Sports ont acheté les droits TV de la Ligue 2 pour la somme record de 64 M€ par saison, soit quasiment le triple du contrat actuel (22 M€). Mécaniquement, les pensionnaires de l'antichanbre de la L1 devraient percevoir des droits en hausse (avec actuellement une part fixe de 4,4 M€ à laquelle s'ajoute différents critères comme la Licence club, le classement, la formation et la notoriété).
Un médiateur pour apaiser les relations entre les actionnaires
C'est un secret de Polichinelle, "les tensions passées perdurent", pour reprendre les mots de Pierre Esnée, entre les 13 actionnaires principaux réunis au sein de la holding SMC 10. "Mon rôle, c'est de trouver des solutions pour que règne la meilleure entente possible. Depuis deux ans que j'occupe cette fonction, j'essaye de rassembler. Il faut retrouver une osmose. Même si le passé remonte toujours, il faut essayer d'en faire table rase. C'est dans l'intérêt du club. On ne peut pas rester dans cette situation indéfiniment. Ce n'est pas sain".
Pas une mince affaire. Toujours est-il que le président du SMC 10 a fait appel à "un médiateur". "On s'est attaché les services d'une personne neutre, extérieur. Il est présent pour écouter tout le monde (les 13 actionnaires du SMC 10 + les trois membres du directoire : Fabrice Clément, Jean-Marie Piranda et Jean-Yves Mercier). A lui de nous proposer des solutions, des alternatives intelligentes". Quitte à envisager des départs ? Pierre Esnée ne l'exclut pas. "Si un ou plusieurs actionnaires ne sont pas à l'aise dans cette structure, c'est très simple, il suffit de sortir et d'autres prendront la place".