"La certitude, c’est que la politique du club dans les prochaines années se tournera de plus en plus vers l’ADN normand et le centre de formation". Dans le dernier entretien qu’il a accordé à nos confrères d’Ouest-France, Pierre-Antoine Capton a martelé l’importance de la formation dans son projet pour le Stade Malherbe. Mais quelle réalité se cache derrière les mots du (futur) propriétaire du club caennais ? Dans un contexte de rigueur budgétaire, comment se porte le centre du SMC aujourd’hui ? « Normandisation », développement de la post-formation, moyens financiers et humains accordés… Tout au long de la semaine, la rédaction de FOOT NORMAND consacre une série d’articles sur le centre de formation des « Rouge et Bleu ».
A écouter certaines voix sur les réseaux sociaux ou autour des mains courantes le week-end, le Stade Malherbe souffrirait d’un manque de talents dans les promotions à venir au sein de son centre de formation. Des allégations réfutées par ses responsables. Ce qui est sûr, c’est qu’à son échelle, la barre a été placée très haute. Finaliste de la Coupe Gambardella en 2022, la génération 2004 (Brahim Traoré, Diabé Bolumbu, Noé Lebreton, Mohamed Hafid, Norman Bassette) sans oublier Tidiam Gomis, bien que seulement dans sa 18e année, ne peut être prise comme source de comparaison. "Elle est exceptionnelle", souligne Djibi Diao, le « patron » du recrutement jeunes. Avant les « 2004 », les « 2002 » dans laquelle on retrouve Johann Lepenant (aujourd’hui à Lyon), Lamine Sy, Andreas Houtondji et Ilyes Najim (prêtés respectivement au FC Rouen, N1, à Rodez, L2 et à Cholet, N1), Robin Legendre (Quevilly-Rouen, sous contrat amateur) ou encore Kelian Nsona (Hertha Berlin en Allemagne) avaient déjà frappé très fort.
Mais le SMC n’a pas les capacités, humaines et financières, de sortir toutes les saisons une demi-douzaine de futurs professionnels. Combien de structures françaises le peuvent ? Assurément, elles se comptent sur les doigts d’une seule main même si la marche est moins dure à franchir en Ligue 2 que pour sa grande sœur, la Ligue 1. En former ne serait-ce qu’un tous les ans en mesure de porter le maillot « Rouge et Bleu » sur la pelouse de d’Ornano relève déjà de la performance. A Caen, les « 2008 » constituent la prochaine « cuvée » qui attire l’attention. Elle comprend notamment le milieu relayeur Soan Ameline, récent vainqueur du Tournoi de Montaigu avec les mini-Bleuets, le milieu relayeur Cluver Sambi Mbungu, décrit comme l’un des plus gros potentiels jamais passé par Malherbe, le défenseur polyvalent Aurèle Schel, victime malheureusement d’une rupture des ligaments croisés en octobre, les joueurs de couloir Ousmane N’Diaye (à droite) et Lassana Diomandé (à gauche), sélectionnés en équipe de France avenir U16. Avec l’arrière central Othniel Pembélé et l’attaquant Nicolas Fomba Wombo, ils seront tous engagés avec le club normand via un contrat aspirant la saison prochaine.
Un chemin parsemé d'embûches : l’exemple Noé Lebreton
Entre les « 2004 » et les « 2008 », plusieurs profils retiennent l’attention : l’attaquant Ilyes Miraoui (2005, amateur), le milieu offensif Diabé Kanouté (2007, aspirant), le milieu défensif Josué Kimboma* (2006, en discussions pour un contrat stagiaire)… Une liste de noms loin d’être exhaustive même s’il est impossible à ces âges d’affirmer quel garçon accomplira une carrière ; le chemin conduisant vers le haut niveau étant parsemé d’embûches (blessure, problème de croissance, adaptation à un nouvel environnement concurrentiel…). Pour les éducateurs, le seul critère qui vaille pour juger de la réussite d’un parcours de formation est le temps de jeu en équipe première. "Que ce soit chez nous (Brahim Traoré, Noé Lebreton) ou dans des clubs où nos jeunes sont prêtés (Lamine Sy, Andreas Hountondji, Ilyes Najim)", précise Matthieu Ballon, le directeur du centre caennais. La signature du premier contrat « pro » n'ayant plus de réelle signification car il sert avant tout pour les clubs à protéger des jeunes joueurs de sollicitations extérieures. "De toute façon, tu peux faire signer autant de contrats pros que tu veux. Si c’est juste pour gonfler tes chiffres mais que les garçons ne jouent pas derrière, ça ne sert à rien", prévient Matthieu Ballon.
"En matière de formation, c’est très difficile de se livrer à des pronostiques", se montre prudent Djibi Diao, à raison. "Le bilan, on ne pourra le faire que dans 10-15 ans. Certains joueurs sont à éclosion plus tardive. Ils peuvent démarrer timidement et à un moment, exploser". Tous les jeunes ne sont pas capables d’évoluer en L2 ou en L1 à 17 ou 18 ans ; ce qui ne signifie pas forcément qu’ils ne deviendront pas « pros » plus tard. Les exemples sont légion. D’ailleurs, qui aurait parié en 2020, à son arrivée au centre, que Noé Lebreton (20 ans depuis le 22 avril) serait un titulaire indiscutable dans le onze caennais ? S’il était considéré comme "un top joueur", en U13 quand il fréquentait les rangs de l’US Avranches dixit Djibi Diao, le milieu de terrain a connu une période délicate sous les couleurs « Rouge et Bleu ». "En U16, Noé a été perturbé par une blessure. Sa réathlétisation a été compliquée. On le voyait courir avec Julien Lecoq (préparateur physique), on se disait : « Ça va prendre beaucoup de temps ». Il n’a rejoué qu’en janvier et effectué sa reprise en U17 nationaux qu’en mars juste avant l’arrêt des compétitions lié au Covid (en 2020)", se remémore Matthieu Ballon, le directeur du centre de formation du SMC. "A ce moment, la priorité, c’était qu’il retrouve le niveau qui lui avait permis d’intégrer notre préfo". A la vue de ses performances sous la direction de Nicolas Seube depuis début décembre, on peut dire qu’il y est parvenu. Un bon exemple à méditer pour les jeunes qui traverseront, au cours de leur cursus de formations, des passages à vide.
*Tout comme Léo Milliner, Tristan Rozier, Noha Lapisse-Pouchard et Djulys Gomis (tous les quatre également de la génération 2006), Josué Kimboma pourrait parapher un contrat stagiaire avec le SM Caen dans les prochaines semaines.